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mandolines et des guitares, les symphonies de Beethoven, sous l’excellent prétexte que ces œuvres furent quelquefois, au xixe siècle, exécutées par des Estudiantinas, sur des instruments de cette nature.

Nous n’avons malheureusement pas eu le plaisir d’être convié à cette bonne soirée qui, en raison de son caractère strictement privé, ne fut annoncée ni par les journaux, ni par des affiches, et nous regrettons vivement de n’en pouvoir rendre compte en détail. Nous tenions pourtant à la signaler et à féliciter les organisateurs de leur persévérance dans l’œuvre, si intéressante au point de vue de l’histoire musicale et si éminemment artistique, qu’ils ont entreprise il y a quelques années et qu’ils poursuivent avec une louable conviction, sans s’inquiéter des critiques et des quolibets d’adversaires malveillants et peu informés des choses de l’art.

L. V.

Concerts annoncés

Lundi 19 décembre, salle Philharmonique, premier concert de la Société lyonnaise de musique classique, avec MM. de Greef et Capet.

Le même jour, salle Béal (21, rue Longue) concert de Mlle Mélanie Marzo et de M. Charles Paganetti.

Mercredi 21 décembre, aux Folies-Bergère, deuxième concert de la Symphonie lyonnaise avec le concours de Mlle Kahn. Au programme, 5e Symphonie en ut mineur, de Beethoven ; Suite Pastorale, d’Emmanuel Chabrier ; Menuet d’Orphée de Gluck, et plusieurs mélodies d’auteurs modernes.

Fanfare Lyonnaise. — Le concert réservé aux membres honoraires qui avait été indiqué dans le Bulletin mensuel comme devant avoir lieu le vendredi 23 décembre courant est définitivement fini au jeudi 22 à huit heures et demie du soir.

Au programme : Mmes Roussillon, Millet et Himbert-Kiemlé pour la partie instrumentale, et pour la partie vocale, trois de nos anciens artistes du Grand-Théâtre et de ceux que le public a le plus aimés et appréciés, Mmes Doux, De Méryanne et M. Beyle.

À TRAVERS LA PRESSE

Tristan et Isolde

Dans le Journal, M. Catulle Mendès explique en excellents termes pourquoi il estime que Tristan est, de toutes les œuvres de Wagner, la plus propre à conquérir, jusqu’en ses plus intimes profondeurs, l’âme française.

Dans Tristan et Isolde, toutes les âmes aimantes de n’importe quelle humanité saignent leurs délicieuses blessures. Ce sont ici les Noces suprêmes de l’Amour et de la Mort. Ici se conjoignent les jumelles éternités du Baiser et du Néant. Rien qui appartienne spécialement à telle ou telle race, tout qui appartient à tous les êtres. Non seulement il importe peu que la scène se passe à Cornouailles ou à Kerléon, que le roi Marke soit trahit par Tristan, que Tristan soit trahi par Melos ; non seulement il est oiseux de se demander si la passion de Tristan pour Isolde et d’Isolde pour Tristan est née d’eux-mêmes ou du breuvage d’amour. — si voisin du breuvage de mort. — que leurs versa Brangœne ; mais il n’importe pas davantage que Tristan soit Tristan et qu’Isolde soit Isolde.

Ils ne sont pas eux-mêmes, en effet, ils sont, depuis toujours, pour toujours, à travers les universels avatars de l’existence et du trépas, l’amante et l’amant, — plus que cela, l’amour même ! Ils n’ont pas de moment, ayant la perpétuité. André Chénier, dans le projet d’un poème qu’il n’écrivit point, parle de l’Ombre qui existait avant le surgissement de la lumière ; c’est à cette ombre, inconcevable aux vivants, à cette ombre, faite des ténèbres antérieures à l’espérance du premier soleil, ou postérieures à l’oubli d’une dernière étoile, qu’aspirent, comme à un inéveillable lit d’hymen, les forcenés et purs amants, le Couple par excellence. Et dans ce vertige de deux êtres vers l’inexistence, nulle philosophie. Richard Wagner a lu pour la première fois Schopenhauer pendant qu’il travaillait à Tristan et Isolde ? coïncidence peu digne d’être signalée, l’œuvre wagnérienne, alors, étant presque achevée ; et il y avait longtemps que, comme le Bouddha au jardin des bambous,