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revue musicale de lyon

ii

[partition à transcrire]

Ainsi, par son caractère et son origine, il répond à l’idée de charité incarnée par le personnage de l’Étranger lui-même. C’est en effet, par une inépuisable charité, un besoin de dévouement incessant que se distingue un homme venu un jour dans un village de pêcheurs, et cet homme selon la destinée est incompris et méconnu : ses allures font de lui un suspect, il passe pour sorcier et de lui chacun se détourne avec soin. Le voilà, au lever du rideau, qui vient se mêler tristement à la foule des pêcheurs se lamentant sur les résultats de la pêche du jour. Une vielle femme de l’assemblée fait remarquer à ceux qui l’entourent une Émeraude précieuse qui luit au bonnet du paria : les flûtes à l’orchestre esquissent le thème de l’Émeraude sacrée qui souvent se fera jour dès lors dans la trame instrumentale.

iii

[partition à transcrire]

Un thème de misère et de fatalité harcèle l’Inconnu en proie à la haine et les pêcheurs victimes eux d’une mer inclémente.

iv

[partition à transcrire]

Alors s’oppose une éloquente phrase qui chante doucement la bonté surnaturelle de l’homme maudit :

v

[partition à transcrire]

Cette bonté qui devait lui attirer les cœurs rudes de ses voisins, une seule personne ne l’a pas dédaignée : Vita, la fiancée d’André le Douanier, prend un plaisir singulier à causer avec l’inconnu qui lui narre ses courses lointaines. Au rebours de ses compagnes, elle déclare franchement que, si elle aime le beau douanier, elle recherche volontiers la société de l’Étranger. Vita est à la fois étonnée et émue des actes de ce dernier. Sous ses yeux elle voit le mystérieux pêcheur généreusement abandonner le produit de sa pêche à un vieillard indigent dont les petits enfants et la fille ne savent qu’injurier leur bienfaiteur.

Son cœur s’émeut et l’orchestre chante la confiance qui s’est emparée du cœur de la jeune fille délicieusement :

vi

[partition à transcrire]

Entre les deux personnages restés seuls le dialogue s’engage. Vita révèle la sympathie invincible qui l’enchaîna du premier jour à son étrange ami et celui-ci laisse échapper l’aveu d’un amour jusqu’alors caché. La jeune fille, par une tactique bien féminine, lui redit les mérites de son fiancé et l’Étranger regrette aussitôt d’avoir troublé ce cœur ingénu par ses impudentes paroles : il annonce son départ souhaitant à son amie le bonheur avec son rival. Devant cette belle scène s’est fait jour à l’orchestre le beau thème d’amour.

vii

[partition à transcrire]

D’abord inquiet, hésitant puis ardemment passionné, le thème de confiance de Vita lui répond ainsi qu’un autre motif de sympathie caractéristique de la fascination exercée par l’Étranger. Longtemps l’Étranger et Vita