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rait le poids tenseur de façon à produire des sons extrêmement aigus, et l’on poursuivrait la recherche jusqu’à ce qu’on ait atteint la limite supérieure des perceptions. On chiffrerait alors la capacité auditive du sujet soit simplement par les poids tenseurs maximum et minimum exprimés en grammes (cela à condition que l’on opérât avec une corde étalon, c’est-à-dire toutes conditions, diamètre, densité et longueur de corde, égales d’ailleurs), soit en appliquant la formule :

qui permettrait d’obtenir des résultats comparables, nombrés en vibrations, avec des cordes quelconques, pourvu qu’elles fussent définies.

Mais il ne faut pas perdre de vue qu’une telle expérience renferme un grave élément d’erreur : l’approximation dans l’uniformité d’impulsion donnée à l’archet au au plectre ; ou, en d’autres termes, l’inexactitude du facteur intensité du son. Je propose donc d’user du manuel opératoire suivant :

Soit un récipient, gradué, partiellement rempli de liquide, et dans le goulot duquel pénètre le robinet de l’acoumètre décrit plus haut pour l’étude de la limite d’intensité. On maintiendra constante la distance de la surface liquide à l’extrémité du robinet, c’est-à-dire la hauteur de chute, mais on fera varier la hauteur du liquide, de façon à modifier d’une quantité mensurable la dimension du flacon, et l’on recherchera à partir de quelle limite, pour un sujet donné, une note est perceptible au grave ; un autre récipient analogue, mais naturellement plus petit permettra la détermination de la note aiguë maximum perceptible.

Quant à l’étude de l’acuité auditive en fonction des variations de timbre, elle se heurte à de presque insurmontables difficultés. Nous y reviendrons plus loin.

(À suivre)

Edmond Locard.

L’ÉTRANGER

de VINCENT D’INDY

L’Étranger, la dernière œuvre dramatique de M. d’Indy, a subi la loi commune, et c’est après avoir fait halte à la Monnaie de Bruxelles que la partition nous revient ayant acquis en France le droit de cité. Aujourd’hui la scène lyonnaise accueille cet Étranger… : ne pourrions-nous pas le dire en songeant à l’auteur tout aussi bien qu’à l’œuvre ? M. Vincent d’Indy est presque un inconnu pour le public lyonnais[1], et la séduction rare émanant de sa musique comme de sa personne combien ont eu la joie autour de nous de la goûter ? Les préjugés et les légendes se sont accumulés autour de son nom : cette très simple étude voudrait avoir le mérite de les dissiper en facilitant la compréhension d’une œuvre dont la complexité n’est qu’apparente et qui doit s’imposer à tous par sa grandeur et sa sereine beauté.

Acte Premier

Les violons et les altos dessinent rapidement une souple figure en triolets qui décrit la mer et ses aspects changeants.

i

[partition à transcrire]

Nous sommes en effet au bord de l’Océan et la grande voix des flots parlera tout le long du drame, caressante ou furieuse. Sous les ondulations de ce thème persistant apparaît une mélodie sereine au caractère nettement religieux (ii).

Ce thème capital est extrait d’une antienne de l’Office du Jeudi-Saint.

Ubi Caritas et Amor, ibi Deus est.

  1. Cette étude a été écrite l’année dernière (N.D.L.R.)