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2e Année No6
Dimanche 27 Novembre 1904

REVUE MUSICALE DE LYON

Paraissant le Dimanche du 20 Octobre au 1er Mai

Léon VALLAS
Directeur — Rédacteur en Chef

Principaux Collaborateurs
Louis AGUETTANT ; Fernand BALDENSPERGER ; Gabriel BERNARD ; M.-D. CALVOCORESSI ; M. DEGAUD ; Henry FELLOT ; Daniel FLEURET ; Paul FRANCHET ; Vincent d’INDY ; André LAMBINET ; Paul LERICHE ; Edmond LOCARD ; A. MARIOTTE ; Marc MATHIEU ; Edouard MILLIOZ ; Antoine SALLÈS ; Jules SAUERWEIN ; Joseph TARDY ; Georges TRICOU ; Jean Vallas ; Léon VALLAS ; G. M. WITKOWSKI.

De Bach à Beethoven

(suite et fin)

Nous voici arrivés au point le plus délicat de ce travail, celui où il s’agit de faire clairement saisir la nature de la chaîne intellectuelle qui, par les annaux Rust et Emmanuel, relie Beethoven au grand ancêtre de la musique symphonique moderne, à Sébastien Bach.

Il importe, pour cela, de se bien pénétrer de la caractéristique spéciale du génie de Beethoven, alors qu’après une période de production de six années, période relativement peu intéressante où il se montra presque servile imitateur de Mozart, il entra résolument, vers 1802, dans une voie toute nouvelle qui devait le conduire quinze ans plus tard à l’édification de ces impérissables monuments : la Neuvième Symphonie, la Messe en , les derniers quatuors.

Les caractères principaux de cette époque de maturité sont au nombre de trois :

L’importance et la dramatisation de l’idée musicale ;

L’organisme du développement ;

L’établissement de la grande variation comme élément constitutif d’un cycle musical.

Voyons d’abord ce qui a trait à l’idée.

Dans les conversations rapportées par Bettina d’Arnim, qui, si elle ne fut pas toujours un truchement bien fidèle, ne peut cependant, en l’espèce, être soupçonnée d’avoir inventé de toutes pièces une genèse de l’idée, on trouve ces paroles qu’elle dit avoir été prononcées par Beethoven lui-même : « Du foyer de l’enthousiasme s’échappe la mélodie ; haletant, je la poursuis, j’arrive à la rejoindre, elle s’envole de nouveau, elle disparaît, elle plonge dans le gouffre profond où les passions se déchaînent, je l’atteins encore, je la saisis, je l’étreins avec délire, rien ne peut plus m’en séparer, je la multiplie en modulations diverses, et me voilà enfin triomphant de l’idée musicale ! »

Cette citation, si les termes n’en sont pas de tous points authentiques, peut cependant servir à nous montrer quelle importance Beethoven attachait à l’idée musicale ; il la considérait à juste titre comme le personnage agissant, la cause finale du morceau de musique. Les phrases qui nous paraissent les plus simples dans son œuvre sont pour lui l’objet