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sa vie d’artiste — avait incité Charles Bordes à écrire des motets inspirés des principes, qu’il recommandait dans la Tribune de Saint-Gervais. Il en composa un assez grand nombre, pour la plupart consacrés à la Sainte-Vierge : quatre antiennes : Alma redemptoris mater, Ave Regina, Regina cœli lœtare, Salve Regina, un motet à 4 voix : Fili, quid fecisti nobis hic ? un répons au Saint-Sacrement : Verbum caro factum est ; un salut à trois voix égales : O sacrum convivium ; un Ave Regina cœlorum à 4 voix mixtes et un Ave Maria[1] à 4 voix mixtes. Toutes ces œuvres, ainsi d’ailleurs que d’autres travaux de maître de chapelle, des faux bourdons, des cantiques en langue vulgaire, c’est-à-dire française ou basque, des harmonisations de chants grégoriens, des versets d’orgue, se distinguent par une rigoureuse conformité à l’esprit de l’Église, un respect louable de la prosodie latine, une grande sincérité d’accent et de sentiment.

Nous arrivons ainsi aux pièces profanes, qui constituent indéniablement la partie la plus importante de l’œuvre vocale de Charle Bordes. Les plus anciennes datent de 1884, peut-être même de plus loin. Elles sont intitulées : Avril (Aimé Mauduit), Soirée d’hiver (F. Coppée) et Amour évanoui (M. Bouchor)[2], et furent chantées, le 9 février 1884, à la Société Nationale. Ce sont des productions quelque peu juvéniles, où se manifeste une inexpérience assez naturelle de la prosodie vocale. De la même année 1884 date la première mélodie, que Charles Bordes écrivit sur des poésies de Verlaine, sont auteur préféré : Soleils couchants. Ce Lied offre des harmonies précieuses et subtiles : il est de beaucoup supérieur aux précédents et probablement aussi aux trois Madrigaux amers, sur des poèmes de Léon Valade, qui furent dits à la Société Nationale, le 4 février 1887, par Mme Blanc Deschamps, et n’ont pas été édités.

Les Soleils couchants se rattachent à une série de quatre pièces, intitulées Paysages tristes[3] (1884-1886), et dont les plus jolies elles-mêmes : Chanson d’Automne (1886), fort élégamment écrite ; l’Heure du Berger (1886), empreinte d’un profond sentiment de la nature, que rend, de façon exquise, la modulation du ton de ré mineur en celui de mi bémol majeur sur :

Blanche, Vénus émerge,

suivie d’un charmant retour au ton fondamental, à ces mots :

Et c’est la nuit

ne dénotent point encore une originalité accentuée.

À ce point de vue, Promenade sentimentale (1886) offre matière à la critique, ainsi d’ailleurs que certain maniérisme dans Soleils Couchants et quelque banalité (cantilène mélancolique à la basse) dans l’Heure du Berger.

(À suivre)

Henry Fellot.

LISZT et WAGNER

À propos de la « Tétralogie »

« Très cher, l’Or du Rhin est fini, mais mois aussi je suis fini !  !  ! » écrit douloureusement Richard Wagner à son fidèle ami, le 15 janvier 1854. Dans cette longue lettre pleine d’angoisse, de tristesse, d’amers regrets en face de l’indifférence des souverains et peuples allemands, des représentations incomplètes, mutilées, de son

  1. Toute cette série a été publiée par l’Édition Mutuelle.
  2. Ces trois premières mélodies et Dans la gigue ! ont été publiées chez Hamelle, Chanson triste, Sérénade mélancolique, Fantaisie persane, chez Bruneau père actuellement chez Bornemann, Pensées orientales, chez Demets.
  3. Chantés à la Société Nationale, par Mlle Lépine, le 5 février 1887.