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revue musicale de lyon

Le thème se compose de deux périodes de huit mesures reprises à tour de rôle par les deux instruments. C’est une mélodie calme, limpide et douce.

La première variation est au contraire vivante et animée. Le rôle prépondérant appartient au piano. Le violon se borne à lui renvoyer de courtes et nerveuses réparties.

Un chant en croches coulées du violon occupe toute la deuxième variation. Il est à la fois gracieux, vif et élégant.

La troisième variation c’est le triomphe de la main gauche qui pendant 32 mesures fait retentir un étourdissant roulement de triolets martelés.

Quatrième variation. Le violon attaque par des accords en simple et quadruple corde, secs mais doux, chaque période du thème, le piano achève la période par des notes ténues et liées. À la deuxième reprise frappe à son tour des accords secs et détachés.

La cinquième variation est tout à fait remarquable. La main gauche chante dans le grave, comme un violoncelle, le thème sans autre modification que sa transition en mineur. La main droite se tait. Le violon fait entendre un intéressant motif en contrepoint. À son tour la main droite redit deux octaves plus haut le thème mineur précédemment chanté par la basse, tandis que celle-ci répète exactement mais dans le grave la partie contrepoint du violon. Ces mêmes procédés se renouvellent dans la seconde période, qu’un accord en si bémol majeur vient clôturer. Ici se place un intermède tout à fait imprévu. Il est composé d’une série de groupe formés d’une double croche suivie d’une croche pointée. Trois de ces groupes d’un rythme un peu haché figuraient déjà à l’avant dernière mesure de la deuxième période du thème de l’allegretto. La main gauche puis le violon se renvoient alternativement quatre séries de ces groupes, puis la main gauche les accapare. Une transition s’éteignant peu à peu jusqu’à un morendo imperceptible ramène la sixième variation en six-huit et en la majeur. Voici revenues la bonne humeur et la franche jovialité. Leurs gais accents, un instant tempérés par l’intercalation d’un épisode finement ému, retentissent plus joyeux et plus éclatants jusqu’à la terminaison.

Quelle richesse de coloris, quelle fécondité d’imagination Beethoven a déployées dans ces variations. Chacune d’elles a son cachet spécial, sa physionomie bien personnelle.

Un abîme sépare les variations écrites par un Beethoven et les Grands Maîtres de ces misérables variations dépourvues d’idées, pauvres de style, dont le seul but est de faire briller un virtuose. Les creuses élucubrations sur le Carnaval de Venise et ses congénères sont tombées dans un discrédit mérité. Les variations dont Beethoven a émaillé quantité de ses œuvres, quelques-unes de ses symphonies, possèdent une haute valeur artistique et seront toujours en honneur. En résumé, dans cette sixième sonate, à un adagio, chef d’œuvre de goût et d’expression succèdent d’admirables variations. La première partie offre moins de relief.

(À suivre)

Paul Franchet.

Les « Enfantines »

de moussorgski

Au septième samedi de poésie et de musique du théâtre Victor-Hugo, une audition vient d’être donnée qui ne saurait laisser indifférents les lecteurs de la Revue musicale de Lyon. Au programme étaient inscrites les Enfantines de Moussorgski.

On connait l’admirable vitalité de la jeune école musicale russe et l’originalité