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sont donnés les principes pratiques, aussi utiles pour l’analyse que pour la connaissance des règles de l’écriture, qui sont la conséquence logique des généralités énoncées et expliquées dans la première.

Pour M. Riemann (et je pense que tous seront d’accord avec lui sur ce point) les éléments de rythme et de mètre propres à la musique sont foncièrement différents de ceux du langage et n’ont leur raison d’être que dans la seule musique.

Le principe essentiel d’une idée musicale envisagée en soi ne saurait provenir que d’un rapport, et par définition, ce rapport devra être le plus simple possible. Ce sera donc un rapport formé de deux termes irréductibles. Le premier est un énoncé, un élan (temps léger, anacrouse) et le deuxième une conclusion, la résolution du mouvement (temps lourd). La valeur de ces deux termes ne saurait être absolument la même : afin qu’ils soient aussi nettement différenciés que possible, il faut que non seulement l’accentuation mais aussi la durée en soient en principe inégales. Notre élément premier aura donc l’aspect suivant :

[partition à transcrire]

Ce qui revient à dire que la forme de mesure la plus simple te qui se comprenne le plus aisément est la forme ternaire, celle où le temps lourd a une valeur double de celle du temps léger.

Nous voyons également qu’en fait une « mesure » réelle est tout autre chose qu’une mesure écrite, et qu’il est logique de considérer la barre de mesure comme placée entre le temps léger et le temps lourd, c’est-à-dire non à la limite, mais à l’intérieur même de la mesure.

Ce n’est point là, d’ailleurs, le seul malentendu auquel ait donné lieu l’écriture conventionnelle de la musique. Les barres telles que les emploient la plupart des compositeurs sont souvent placées arbitrairement et ne correspondent à aucune réalité rythmique. La véritable mesure ne peut comprendre que deux, ou trois temps effectifs. Selon le cas, une mesure écrite peut soit ne comprendre qu’un seul temps (mouvement très vif, scherzos, etc.) et alors il en faut deux ou trois pour constituer une mesure réelle, ou au contraire être formée de plusieurs mesures réelles (mesure à quatre temps, à six-huit lent, à neuf-huit lent, etc.).

Ce schème primordial de l’unité rythmique, du motif, est également celui des unités moins minimes de la phrase musicale. Nous avons reconnu dans le motif une valeur initiale (légère), puis une deuxième valeur (lourde) qui est la réponse, le conséquent de la première. Considérons maintenant le motif entier comme une unité indivisible : il deviendra unité initiale, et en vertu du principe posé plus haut devra être suivi de sa réponse, qui sera un nouveau motif semblable. Ainsi est formé, par groupement de deux motifs, un élément métrique, une proposition si l’on peut dire. Que cette proposition, envisagée comme un tout, se complète à son tour d’un conséquent égal à elle, et ce sera la période, soit un groupe de quatre mesures. Deux telles périodes consécutives, l’antécédent et le conséquent, forment la phrase complète.

La phrase compte donc forcément huit mesures, en principe du moins. Dans la pratique, nous savons qu’une phrase musicale en comprend un nombre indéterminée, qui peut être supérieur ou inférieur à ce chiffre de huit. En fait on peut ramener n’importe quelle phrase musicale au type théorique établi par M. Riémann ou à une modification régulière et rationnellement analysable de ce type.

Voici, rapidement indiquées, les diverses modifications possibles.

1o L’unité initiale légère (mesure et par extension groupe de deux mesures, voire antécédent, quatre mesures, entier), peut