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trente, quarante autres théâtres, s’il a obtenu du succès. L’auditeur, qui une première fois n’y a rien compris, se familiarise avec lui à la seconde représentation ; il l’aime davantage à la troisième, et finit surtout par se passionner tout à fait pour l’œuvre qui l’avait choqué de prime abord.

Il n’en peut être ainsi pour des symphonies qui ne se sont exécutées qu’à de longs intervalles, et qui, au lieu d’effacer les mauvaises impressions qu’elles ont produites à leur apparition, laissent à ces impressions le temps de se fixer et de devenir des doctrines, des théories écrites, auxquelles le talent de l’écrivain qui les professe donne plus au moins d’autorité, selon le degré d’impartialité qu’il semble mettre dans sa critique et l’apparente sagesse des avis qu’il donne à l’auteur.

La fréquence des exécutions est donc une condition essentielle pour le redressement des erreurs de l’opinion, lorsqu’il s’agit d’œuvres conçues, comme celles de Beethoven, en dehors des habitudes musicales de ceux qui les écoutent.

Mais si fréquentes, si entraînantes qu’on les suppose, ces exécutions même ne changeront l’opinion ni des hommes de mauvaise foi, ni des honnêtes gens à qui la nature a formellement refusé le sens nécessaire à la perception de certaines sensations, à l’intelligence d’un certain nombre d’idées. Vous aurez veau dire à ceux-là : « Admirez ce soleil levant ! — Quel soleil ? diront-ils tous ; nous ne voyons rien. » Et ils ne verront rien en effet, les uns parce qu’ils sont aveugles, les autres parce qu’ils regardent à l’occident.

Nous annoncerons toutes les œuvres musicales et les ouvrages se rapportant à la musique adressés à la Rédaction et nous rendrons compte des plus importants.

Nouvelles Diverses

Le Berliner Lokal Anzeiger a fait une enquête sur ce qu’un certain nombre de personnalités éminentes espèrent de l’année 1904. Parmi les réponses des musiciens nous trouvons l’opinion — qui nous semble très juste — du célèbre Joachim sur Berlioz :

« Hector Berlioz fut certainement un tempérament poétique, plein d’imprévu qui voulait montrer sa nature et ses tendances dans ses compositions, et notamment par l’éclat brillant de son orchestration. Mais son invention mélodique est si pauvre, ses combinaisons d’harmonie et de contrepoint si recherchées qu’on est forcé de dire de lui : « Jamais la musique ne fut sa langue maternelle ! » Richard Wagner l’a d’ailleurs caractérisé en l’appelant une caricature de Beethoven. »

Un comité vient de se former à Vienne pour élever un monument à la gloire de Johann Strauss, l’auteur du Beau Danube bleu et d’un grand nombre d’aimables valses qui ont fait le tour du monde.

M. Georges Moore, le romancier anglais bien connu, vient de poursuivre devant la justice deux joueurs d’orge dont les concerts trop répétés troublaient son travail. Les magistrats lui ont donné raison, estimant que ces musiciens ambulants imposent en quelque sorte la générosité du public par une véritable persécution.

On parle beaucoup en ce moment de l’ouverture d’un quatrième théâtre lyrique qui serait exploité l’hiver prochain avec le double concours d’une troupe allemande et d’une troupe italienne.

M. Camille Saint-Saëns vient de terminer un Hymne à la France, sur des paroles de M. COmbarieu, destiné à être chanté dans les établissements d’enseignement secondaire dépendant de l’Université de France.

C’est M. Liard, directeur de l’enseignement, qui avait demandé cette œuvre à M. Saint-Saëns.