Page:Revue Musicale de Lyon 1903-12-29.pdf/9

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
129
revue musicale de lyon

commun avec le drame lyrique et les réformes introduites par Wagner dans les rapports de la musique avec la scène. Tout au plus peut-on constater un certain effort pour se débarrasser des formules trop démodées : la cavatine se dissimule et devient un cantabile ; dans les duos les personnages chantent l’un après l’autre et renoncent à l’ensemble traditionnel à la tierce ou à la sixte et le final n’est plus forcément chanté par tous les artistes alignés devant le trou du souffleur, mais c’est bien toujours le même et antique procédé. On n’évite pas plus la chanson bachique que le chœur religieux auquel vient s’ajouter la voix de la prima donna en détresse, pas plus que la chanson du postillon avec accompagnement de fouet et de grelots que le septuor où chaque personnage exprime sur la même musique des sentiments totalement différents. L’écriture n’est évidemment pas le côté brillant de ces compositeurs et, quant à l’harmonisation, elle est devenue plus prétentieuse sans être plus intéressante… »

À propos d’un concert donné récemment à Saint-Étienne par Mme Roger-Miclos et M. Hollmann, le Mémorial de la Loire publie une intéressante lettre que nous reproduisons ci-dessous, et dont nous partageons entièrement les idées :

 Monsieur le Directeur,

Un public choisi applaudissait, hier, deux grands artistes ; on louait à l’envie la plénitude de son, le coup d’archet ample, tour à tour délicat et vigoureux, de M. Hollmann ; Mme Roger-Miclos, à la silhouette de prêtresse antique, faisait admirer sans restriction, la grâce et l’élégante netteté de son jeu.

Mais un regret semble avoir été partagé par beaucoup d’auditeurs ; votre estimable journal est certainement le mieux à même de le formuler ; le voici brièvement : Certains artistes parisiens ont sur les capacités musicales des Stéphanois un regrettable préjugé ; ils craignent de fatiguer le public par des œuvres de longue haleine ; et le programme, au lieu d’un nombre restreint d’œuvres excellentes, comporte une suite de morceaux de genre.

Nous souhaiterions que des artistes comme ceux que nous avons applaudis hier nous traitent mieux que ceux-là ne l’ont fait ; l’un et l’autre maîtres virtuoses, pourquoi ne nous ont-ils pas fait entendre une sonate de Hændel, de Beethoven, de Mendelssohn, ou d’un autre « jeune » comme Boëllmann, plutôt qu’une polonaise, simplement agréable ? Madame Roger-Miclos, nous dit-on, est une « merveilleuse interprète de Schumann » ; la valse banale de Moszkowski n’eût-elle pas été remplacée avec avantage par la fantaisie ou les nocturnes du Maître ! Ou l’ariette de Haydn, gracieuse d’ailleurs, par les œuvres superbes, où vibre la beauté et que traverse un souffle de grandeur, que César Franck a intitulées l’une Prélude.Aria.Finale, l’autre Prélude.Choral – et Fugue » ?

Un concerto de Saint-Saëns n’aurait pas fait regretter celui de M. Desjoyeaux.

Il est inutile de faire remarquer que ces réflexions sont un hommage rendu au talent de Mme Roger-Miclos et de M. Hollmann.

Mais nous espérons que M. Peracchio, dont le zèle de propagande musicale est à la hauteur du talent, fera venir à Saint-Étienne d’autres artistes ; et alors, ne pourrait-il les prier de nous considérer comme des auditeurs qui comptent sur la venue des virtuoses pour entendre interpréter les œuvres des grands maîtres, celles surtout que leur difficulté ne rend accessibles qu’à eux ?

P. Forest.

Correspondance de Paris

Deux premières à Paris cette semaine : Au théâtre municipal de la Gaité, Messaline ; à l’Opéra-Comique, la Reine Fiammette de Xavier Leroux.

De Messaline, peu de choses à dire : M. Isidore de Lara, l’heureux compositeur de cette œuvre peu nouvelle, est un riche amateur qui a beaucoup de relations et la célébrité de son œuvre s’explique par des raisons qui ont peu de choses à voir avec la musique ; du reste, les lecteurs de la Revue trouveront ailleurs, sur cet opéra, d’excellents jugements qui me dispensent de porter sur lui une appréciation qui serait certainement très peu bienveillante.

La partition de M. Xavier Leroux, la Reine Fiamette, composée sur le poème exquis de Catulle Mendès, est bien supérieure à l’Astarté jouée en 1901 à l’Opéra ; elle a été très favorablement accueillie ; M. Leroux se rattache beaucoup à l’école de Massenet par le choix des idées, qui ne sont pas toujours de premier ordre, et par la qualité toujours excellente par contre de l’orchestration. L’œuvre est interprétée adorablement par Mlle Gar-