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que tous ils ont écrit sous la même dictée, ont été éclairés par la même lumière, poussés par la même inspiration ; c’est qu’ils sont tous des écoliers du mème précepteur, des secrétaires du même maître : l’Esprit de Dieu.

Grand Dieu où trouver dans les livres des hommes autant de philosophie avec si peu de rhétorique, autant de pensées dans si peu de mots, autant de grâces avec si peu d’artifice, autant de sublime dans une si grande simplicité, autant de science avec toute absence de prétention ?

Ce langage sent le ciel, ces mots portent en relief le cachet de la Divinité. L’homme seul n’a pas pu écrire cela, parce qu’il n’a pas pu le penser. Il y a ici quelque chose qui n’est pas de ce monde, une couleur, un vernis divin.

Un historien profane aurait-il tracé ainsi l’histoire de la création du monde ? Il aurait cherché à appuyer son récit sur des documents, à l’éclaircir par des raisonnements, à le confirmer par des témoignages, à le faire valoir par des autorités. Il aurait surtout présenté les faits de manière à les rendre acceptables par la raison, et même par l’imagination, en écartant tout ce que la raison ne peut pas saisir, tout ce dont la raison s’effraie, se révolte, se scandalise, tout ce qui est au-dessus de la portée, des conceptions de la raison. Et, en effet, tous ceux qui ont écrit sur l’origine du monde, en dehors de la révélation mosaïque, s’y sont tous pris de cette manière, et ils ne nous ont donné que des poèmes fabriqués à grands frais d’imagination, des probabilités plus ou moins téméraires, des romans plus ou moins grossiers, plus ou moins absurdes ; mais ils ne nous ont pas donné, ils n’ont pas pu nous donner l’histoire véritable de la création.

Mais l’écrivain sacré, écrivant sous la dictée d’en haut, assuré de la lumière céleste qui l’éclaire, tranquille sur la parole divine qu’il entend, plein de confiance dans le souffle surnaturel qui l’inspire, certain de la vérité qu’il annonce, et fort de l’autorité que Dieu lui donne, s’y est pris d’une manière bien différente. Il déroule devant les yeux du lecteur, en peu de mots, une série immense de faits merveilleux, sans faire de raisonnements, sans apporter de preuves, sans y ajouter de commentaires, sans donner d’explication, paraissant nous dire : Au nom du Dieu aussi infaillible qu’il est tout puissant, c’est ainsi : croyez.

Avec les lecteurs pour lesquels il écrit, les esprits dociles, les cœurs droits qui ne demandent pas à l’homme de les instruire de la vérité de Dieu, ce grand hagiographe sait très bien qu’il n’a pas des précautions à prendre, des susceptibilités à ménager, des réticences à faire ; et, avec l’assurance que lui donne sa mission d’en haut, sans crainte d’être démenti, il tonne de cette voix qui a fait trembler le Sinaï, et il dit : « Au commencement, Dieu a créé le ciel et la terre. La terre était vide et stérile ; les ténèbres la couvraient de manière à en faire un abîme, et l’Esprit du Seigneur planait sur les eaux ; et Dieu dit : Que la lumière soit faite, et la lumière fut faite ! »

La seule précaution qu’il a prise, c’est celle-ci : de ne rien dire qui