LA LIGNE ET LA COULEUR,
I.
Ce fut par une chaude matinée du mois d’août que Paul Dubiez fit son entrée triomphale à Paris.
La diligence de Caen qui portait Paul et sa fortune déposa dans la cour des Messageries le précieux fardeau, rompu, moulu et couvert de poussière. Celui-ci ne prit pas le temps de réparer le désordre de sa toilette ; il se jeta dans un fiacre, fit placer près de lui une valise fort légère, et cria au cocher d’un ton plein d’assurance :
— Rue Pigale, chez monsieur Guerville.
— Quel numéro ? demanda le cocher.
Paul regarda celui-ci en face, et d’un air fort étonné :
— Numéro quarante-sept, dit-il en levant les épaules.
Puis il se mit à murmurer tout bas quelques mots qui voulaient dire sans doute : Comment ! cet animal ne connaît pas M. Guerville, un nom européen !
On arriva rue Pigale.
Le numéro 47 s’épanouissait au-dessus d’une petite porte dont le cocher tira la sonnette. La porte s’ouvrit et laissa voir un long sentier bordé de fleurs et de verdure. À l’extrémité s’élevait une petite maison décorée de bas-reliefs en plâtre et couronnée par une vaste verrière qui annonçait l’atelier d’un peintre.
Une servante accorte et pimpante vint au-devant du jeune homme. Celui-ci la salua avec tout le respect que l’on doit aux femmes, surtout quand on arrive de province.
— Mon oncle est-il chez lui ? dit le jeune homme.