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ANTHOLOGIE DE LA LITTÉRATURE JAPONAISE

cier avec cette Corée qu’il avait conquise, tandis que, durant la longue paix instaurée par Iéyaçou, et en dépit de l’écrasement causé par la lourde érudition chinoise, une hausse remarquable se produit, bientôt suivie, sous l’ère troublée de Méiji, d’une vague ondulation déclinante et indécise. Une telle évolution contient un enseignement trop clair pour qu’il soit besoin d’y insister.

Mais, pour que le Japon puisse avoir cette paix qui seule peut lui promettre, avec la prospérité économique, un nouveau triomphe de ses arts, il faut que les nations d’Occident renoncent aux interventions lointaines qui, après avoir violé sa solitude séculaire et humilié son légitime orgueil, lui ont imposé ses armements et l’ont jeté dans deux terribles guerres. Or, chez nous, après avoir longtemps refusé de prendre les Japonais au sérieux, on s’est mis tout d’un coup à les considérer comme de dangereux conquérants ; du genre chrysanthémateux, on est passé brusquement à un style mirlitonesque ; et l’on oublie que, depuis Iéyaçou jusqu’aux premières menaces américaines, ce peuple fut fidèle à une politique fondée sur le plus profond amour de la paix. Il faut que nous le comprenions mieux, et c’est à ce point surtout que j’ai pensé en écrivant le présent ouvrage ; car la littérature serait vraiment peu de chose si elle ne pouvait servir à des fins plus hautes. Qu’on parcoure ces pages où les Japonais se montrent eux-mêmes tels qu’ils sont, avec leur cœur généreux et sensible, leur esprit fin et enjoué, leur caractère ami de la nature, des élégances sociales, de l’érudition, des arts, de tout ce qui peut charmer une race très civilisée, et l’on estimera sans doute que, s’ils diffèrent de nous par mille détails secondaires, ils représentent pourtant la même humanité.