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mir. Si le jeune prêtre éprouve quelque curiosité (et comment ne regarderait-il pas, sans en avoir l’air, du côté où sont des femmes ?), on l’accuse encore. Et la vie de l’exorciste[1], combien n’est-elle pas plus dure ! Tandis qu’il voyage à Mitaké, à Koumano, à toutes les saintes, montagnes, il doit subir de terribles ennuis. Si sa réputation commence à se répandre, on l’appelle de toutes parts, et, plus, il réussit dans ses oures, moins il a de tranquillité. Auprès d’un malade gravement attpint, comme il ne lui est pas facile de dompter le mauvais esprit, il tombe de fatigue et de sommeil ; alors, on dit de lui : « Il ne fait que dormir ! » Quelle situation embarrassante ! — Mais tout cela, e’était le vieux temps. Les habitudes d’aujourd’hui semblent plus faciles[2].

L’Impératrice étant allée visiter le daïjinn Narimaça[3], sa voiture entra par la porte de l’Est, si large entre ses quatre piliers ; mais nous[4] préférâmes tourner par la porte du Nord, où il n’y a point de gardes. Certaines, dont la coiffure était en désordre, se disaient, dédaigneuses : « Comme npus serons conduites jusqu’à la porte intérieure, inutile de prendre tant de soins ! » Par malheur, la voiture, couverte de palmes[5], ne put entrer, prise dans l’étroit portail. On disposa donc un chemin de nattes, et on nous pria de descendre, à notre grand dépit. Il n’y avait pas moyen de faire autrement ; mais nous n’en étions pas moins ennuyées de nous voir dévisagées, en passant devant la salle de garde, par les courtisans et les domestiques. Arrivées devant Sa Majesté, comme nous lui racontions la chose, elle rit : « Mais, ici pareillement, il y a des gens qui vous regardent ! Pourquoi avez-vous été si négligentes ? — Sans

  1. Le ghennja, ou yamaboushi (celui oui « se couche sur la montagne »). Ces exorcistes, à la différence des autres bonzes, n’étaient astreints ni a la tonsure, ni au célibat.
  2. Par ce trait final, Sei Shônagon insinue avec malice que les bonzes, dégénérés, ne font plus leur métier en conscience.
  3. Il ne s’agit pas ici d’un ministre d’État, mais d’un tchougou no souké daïjinn, c’est-à-dire d’un intendant au service de l’impératrice.
  4. es dames d’honneur.
  5. Biroghé no kourouma, voiture de cérémonie couverte de feuilles de biro"".