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YAMATO MONOGATARI

Les « Contes du Yamato », c’est-à-dire de la province qui fut pour ainsi dire le cœur même du Japon et dont le nom s’étendit ensuite à tout l’empire, peuvent avoir reçu ce titre, soit dans un sens local comme les « Contes d’Icé », soit plutôt dans le sens général de « Contes du Japon », par opposition aux histoires indochinoises qui remplissaient tant d’autres ouvrages. Ils ne sont d’ailleurs qu’une imitation des « Contes d’Icé » ; mais ils s’en distinguent, quant à la forme, par un style à la fois plus moderne et plus confus, et quant au fond, par le fait qu’ils ne se trouvent pas groupés autour d’un même personnage, mais qu’ils constituent autant de récits distincts. Voici l’un des plus populaires[1].

le tombeau de la jeune fille d’ounaï[2]

Il était autrefois une jeune fille qui demeurait dans le pays de Tsou. Cette jeune fille était recherchée par deux jeunes gens. L’un, habitant du même pays, s’appelait Oubara ; l’autre, habitant du pays d’Izoumi, s’appelait Tchinou. Ces deux hommes étaient pareils comme âge, comme figure, comme extérieur et comme manières. Elle pensait bien à agréer celui qui aurait eu le plus d’amour ; mais leur amour aussi était semblable. Quand la nuit tombait, ils venaient tous deux ; quand ils lui faisaient des cadeaux, ces cadeaux étaient de même nature. On n’eût pu dire que l’un d’eux surpassait l’autre ; et la jeune fille était dans une grande détresse de cœur. Si l’ardeur de ces jeunes gens n’avait pas été intense, la jeune fille n’aurait accepté les vœux ni de l’un, ni de l’autre ; mais comme, après des jours et des mois, l’un et l’autre venaient toujours devant sa porte, et qu’ils manifestaient leur amour de toutes façons, elle ne savait que devenir. Bien qu’elle ne voulût pas accepter leurs présents, ils en

  1. Le récit qui va suivre n’est, en effet, que le développement en prose d’un très vieux thème déjà illustré par trois poèmes du Manyoshou (les deux premiers au vol. IX, part. 2, le dernier au vol. XIX, part. 2).
  2. Nom d’un district de la province de Settsou, dont Ohçaka est la ville principale. Dans ce district était le village d’Ashinoya, où aurait vécu l’héroïne de la légende.