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VOYAGE

Dans deux sacs, faits avec des taies d’oreillers, on plaça le reste des pommes de terre, dont se chargèrent Max Mayburn et Gérald O’Brien. Ruth ne voulut pas se séparer de la cage à poules ; quant à Marguerite et à Jenny, elles emportèrent les coquillages et les autres petits ustensiles de ménage. La caisse fut abandonnée comme trop gênante pour être transportée.

À un moment donné, les neuf compagnons se mirent en route, à la file indienne ; Arthur marchait à la tête et Wilkins fermait la marche. L’on avançait difficilement, car il fallait tantôt gravir un rocher escarpé, tantôt se frayer un passage à travers des lianes ou des racines de mangliers. En somme, c’était un voyage très pénible et fort difficile à mener à bonne fin.





CHAPITRE XII

Les alligators. — L’escalier des Géants. — Arrivée dans un nouveau territoire. — Le faisan-coucou. — L’avoine sauvage. — Un combat inégal. — Le premier kangarou. — Le pays d’Arcadie. — Soupçon de cannibalisme. — Le kakatoès veilleur. — L’ennemi en fuite.

Les falaises au pied desquelles s’étendait le chemin suivi par les voyageurs avaient au moins trois cents pieds de hauteur. Elles étaient perpendiculaires, et même, en certains endroits, surplombaient la rivière, qui avait un mille de largeur. Au centre du courant d’eau, on apercevait des îlots entre lesquels le courant était si rapide, qu’il eût été dangereux d’y passer dans des embarcations.

« Hugues ! Hugues ! s’écria tout à coup Gérald qui marchait le dernier, je vois un des canots ; si tu veux, nous allons aller tous les deux le chercher à la nage. »

À ces paroles, tous les yeux se dirigèrent vers un objet noir qui flottait à la surface de l’eau.

« Monsieur ! Monsieur ! fit à ce moment Ruth en se cramponnant au bras de Hugues, ils sont vivants, ils vont vous manger !

— De quoi parles-tu ? demanda Max Mayburn. Ah ! je vois ! je comprends ! Regarde, Marguerite, dans la direction de cet îlot couvert de mangliers aperçois-tu ces animaux allongés sur le sable, et se chauffant au soleil ? Ce sont des alligators. Il y en a quelques-uns qui nagent, ou plutôt qui se laissent aller au long du courant. C’est la Providence, mes enfants, qui vous a sauvés d’un grand danger que vous alliez courir. Qui plus est, nos canots auraient pu être renversés par ces hideux sauriens, et nous aurions été dévorés par ces horribles monstres. »

À ces paroles, Ruth poussa un cri d’effroi, et chercha à passer en avant