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AU PAYS DES KANGAROUS

fit Hugues ; mais il faut trouver un souvenir de notre excursion allons donc jusqu’à ce grand arbre qui nous a servi d’horizon dans notre marche à travers cette plaine aride. »

Arthur n’émit aucune objection : ce désir lui permettait d’explorer plus avant le territoire ; mais dans cette promenade, qui dura deux heures encore, rien ne sembla digne de remarque aux jeunes gens.

En montant sur le tronc d’un acacia dépourvu de feuillage, Arthur découvrit un horizon en tout semblable à celui qu’il avait vu aux abords de la plage. Il quitta donc son observatoire, et, suivi de son frère et de leur ami reprit tristement le chemin de la mer.

À la tombée de la nuit, les trois explorateurs arrivèrent près de Max Mayburn, qui lut bien vite dans leurs regards désappointés la nouvelle qu’ils apportaient.

« Nous avons mal fait de ne pas nous diriger vers le nord, observa Wilkins. Nous serons forcés, croyez-le, d’aller dans cette direction. Ce n’est pas la première fois que je parcours cette côte et je puis vous affirmer qu’en allant vers le sud nous ne trouverons ni nourriture ni eau.

— Je reconnais, mon brave, que tous les voyageurs qui ont écrit sur ce pays s’accordent à dire que les côtes de l’Australie situées entre le 18e et le 25e degré de latitude sont complètement désertes et inhospitalières, tandis qu’ils affirment que plus bas le sol est fertile et coupé par de nombreux courants d’eau. Seulement, en retournant vers le nord, nous courons grand risque de rencontrer des indigènes. »

Marguerite soupira en songeant qu’elle allait s’éloigner encore de la famille Deverell, mais elle prêta l’oreille à Wilkins, qui disait :

« N’ayez aucune crainte de ces sauvages, ils sont tous poltrons ; une fille les mettrait facilement en fuite. Nous voilà six bien armés et très valides ; nous n’avons qu’à nous montrer pour mettre en fuite une centaine de ces sauvages. »

Max Mayburn secoua la tête et parut ne pas être très rassuré par les paroles du convict ; Arthur semblait éprouver les mêmes appréhensions ; mais comme il ne fallait pas décourager les autres, ni l’un ni l’autre n’exprimèrent leur façon de penser. Il fut donc décidé que l’on s’embarquerait de nouveau, le lendemain matin, et que l’on naviguerait vers le nord, sans perdre de vue la côte, et on éviterait surtout d’aborder à l’endroit où l’on avait aperçu les naturels le jour précédent.

Il fut aussi convenu que l’on chercherait l’embouchure d’une rivière, au moyen de laquelle on pourrait pénétrer plus avant dans l’intérieur des terres.

Jack avait fait une inspection sérieuse de l’état des embarcations ; il les avait même enduites à nouveau de gomme, dont il avait apporté une certaine provision, et il avait enfin resserré les attaches du radeau, de façon à le rendre extrêmement solide.

La nuit fut mauvaise, car les moustiques avaient déclaré une guerre à outrance aux pauvres voyageurs ; mais l’aube se leva, et l’on ne songea plus qu’au déjeuner. Dès que le repas fut terminé, Max Mayburn adressa au Ciel une fervente prière, et l’on se remit en place, les uns dans les canots, les autres sur le radeau.

Depuis leur naufrage, les pauvres abandonnés avaient heureusement joui