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AU PAYS DES KANGAROUS

Conrad. D’ailleurs nous allons seulement à la découverte, et non pas à la guerre. »

Les jeunes gens, après avoir pris congé de ceux qui restaient au camp, s’acheminèrent vers les arbres à huîtres, près desquels ils avaient déjeuné la veille, pénétrèrent dans l’intérieur de cette forêt touffue, et parvinrent enfin de l’autre côté de ce buisson épineux.

Ils traversèrent le lit d’un ruisseau à moitié desséché, car on n’y voyait que des flaques d’eau croupie, peu ragoûtante, et n’invitant pas à se désaltérer ceux qui passaient par là.

Plus loin, les explorateurs eurent à gravir des monticules de sable avant de parvenir sur une montagne assez élevée, couverte de débris de pierres, au milieu desquelles poussait une végétation de plantes appartenant à l’espèce textile.

Tout autour d’eux régnait le silence le plus profond ; ces lieux offraient un aspect de désolation qui navrait le cœur, et ce chaos était d’autant plus affreux à contempler, qu’on apercevait deci delà des troncs morts d’une espèce d’acacia, ressemblant à de grands squelettes décharnés.

Les jeunes gens furent d’avis qu’ils se trouvaient réellement sur une île déserte.

Ils s’avancèrent encore sur ce sol inhospitalier, sans parler, en proie à une tristesse indicible, jusqu’au moment où ils atteignirent un bouquet d’arbres verts, parmi lesquels Arthur reconnut avec un sentiment de joie des choux palmistes d’une soixantaine de pieds de hauteur. Hugues exprima le désir de grimper au sommet d’un de ces arbres, pour couper la partie tendre et mangeable ; mais son frère l’engagea à remettre cette opération à un autre moment, et il lui montra des herbes marécageuses, des joncs élancés, qui indiquaient la proximité de l’eau.

En effet, après un quart d’heure de marche, les explorateurs se trouvèrent en face d’un grand lac aux eaux limpides, au milieu desquelles se jouaient d’énormes poissons tandis que sur les bords une multitude de palmipèdes jabotaient et s’ébattaient en construisant leurs nids. Les bords du lac étaient couverts de moules, et s’il n’y eût pas eu là des moustiques et des mouches, on eût pu se croire dans un vrai paradis terrestre, surtout en comparant cet endroit à la plage desséchée, aux rochers arides, sur lesquels les jeunes gens avaient laissé leurs parents et amis.

« C’est ici que nous allons dresser notre camp retranché, déclara Hugues.

— Allons chercher notre arrière-garde pour l’établir en ces lieux. Nous aurons chair et poisson à notre heure et à notre bon vouloir. Mais nous serons entourés de ces maudits ennemis ailés, à aiguillons piquants, ajouta Gérald, en écrasant un énorme moustique sur son nez.

— Pour éviter ce voisinage désagréable, nous choisirons un endroit assez éloigné de l’eau, répondit Arthur. Avant tout, il s’agit de savoir si nous ne trouverons pas ici des ennemis plus dangereux que les moustiques, et pour cela nous devons explorer la côte. »

Les jeunes gens continuèrent leur marche, et Gérald, puis Hugues eurent la bonne chance de tuer quatre canards, qu’ils mirent dans leur sac. Ils parvinrent enfin, en traversant de superbes pâturages et des bosquets touf-