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VOYAGE

globe nous nous trouvons. Rien ne nous prouve que nous soyons ici sur une île.

– En tout cas, l’endroit me paraît bien désert, ajouta Marguerite d’un air désolé.

— Nous sommes plus mal, j’en conviens, que n’était Robinson Crusoé, fit Hugues à sa sœur, car nous n’avons pas de chèvres, comme lui, et aucun quadrupède ne s’est encore montré à nos yeux. Quant aux bipèdes, y en a-t-il ici ?

— Plaise à Dieu que non, répliqua Arthur ; car il y a plus à craindre d’eux que des goélands et des mouettes.

– En effet, surtout si ces bipèdes étaient des sauvages, remarqua Gérald. Il nous faudrait leur faire la guerre, et nous les réduirions assurément, en vrais Anglais que nous sommes.

— C’est bien dit… en paroles, mon ami, répliqua Arthur ; mais avec quelles armes te battrais-tu ?

– Hélas ! c’est vrai j’oubliais la déplorable condition de notre arsenal. Voyons ! comptons nos instruments de défense : un fusil d’abord, et très peu de munitions ; un coutelas, deux canifs, un couteau à découper la viande, nos couteaux de table, et après ?. Qui de vous possède quelque bonne épée de Tolède ?

– Moi, peut-être, observa Marguerite en riant ; n’ai-je pas un couteau d’argent pour peler les fruits, et une paire de ciseaux ?

— C’est encore quelque chose, fit Arthur ; à votre tour, Jenny Wilson ; voyons, videz vos poches. »

La brave femme exhiba une trousse contenant des aiguilles, du fil et des ciseaux, un dé, une râpe à l’usage des noix muscades, un tire-bouchon et une demi-douzaine de fourchettes.

Jack, en homme prudent, avait conservé dans ses poches un gros couteau, des clous et un marteau.

Vint ensuite Max Mayburn, qui sortit de son sac une paire de tenailles, une trousse d’instruments de chirurgie, un album pour dessiner et des crayons tous objets que Gérald regarda en dissimulant un sourire.

« Allons ! dit-il alors, hâtons-nous de fabriquer des arcs et des flèches, des piques et des massues. Les arbres de la forêt seront fort bons pour cet usage.

— En attendant, il s’agit de faire sérieusement le tour de notre île, si réellement c’est une île, observa Arthur. Nous allons laisser ici Wilkins et Jack pour veiller à notre camp nous n’emporterons que le fusil et les munitions que ce maudit convict a daigné nous laisser ; mais ne craignez rien, nous ne tirerons pas notre poudre aux moineaux. — Surtout, mes enfants, ne répandez pas le sang de vos semblables, s’écria le père. Nous sommes ici des envahisseurs, n’agissons pas en conquérants ; qu’il nous suffise de nous tirer d’affaire. Quand bien même on nous attaquerait, ne répondons pas à nos ennemis ; contentons-nous de les éviter.

— Mais, cher père, il ne nous est pas possible de fuir sans ailes. Nous sommes acculés ici il nous faut vaincre ou mourir. N’importe ! continua Hugues, nous agirons avec prudence. Arthur est notre chef : c’est un vrai