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VOYAGE

« Capitaine, fit-il, que tout le monde mette les mains aux rames pour nous tenir à distance de ces maudits récifs. Allons Black Peter, viens te joindre à nous.

— Je n’en ferai rien, répliqua le convict ; je n’ai pas besoin de tant de précautions. Quand le moment sera venu, je me jetterai à l’eau, et en quelques brassées j’atteindrai le rivage. Je ne veux pas risquer un autre naufrage. »

Il fallut au courageux Mayburn et au convict Wilkins une grande dose de force et d’énergie pour faire force de rames pendant plusieurs heures consécutives, afin de s’éloigner des récifs. À un moment donné, cependant, la fatigue détendit les bras de Mayburn, et il se vit forcé de céder au sommeil.

Jack et Wilkins continuèrent seuls à diriger le radeau jusqu’à la naissance du crépuscule, et à ce moment ils aperçurent les récifs à quelques brasses devant eux. Un courant assez rapide les poussait contre ces rochers de corail. L’anxiété des pauvres naufragés fut alors immense.

« Tout n’est pas perdu, dit alors Wilkins ; regardez cette partie du banc qui s’élève au-dessus des vagues. Je vais me mettre à la nage, en emportant avec moi une corde qui restera attachée au radeau, et je trouverai bien le moyen de fixer cette corde à la roche, de façon à maintenir notre frêle amas de planches. Cela fait, deux d’entre vous viendront me rejoindre, et nous amènerons les autres près de nous. »

Tous les jeunes gens se levèrent aussitôt avec le désir d’aider Wilkins dans son entreprise. Le convict se hâta de mettre à exécution le projet qu’il avait conçu. Il noua à sa ceinture un des bouts de la corde, qu’Arthur et Jack entortillaient solidement à l’une des billes de bois du radeau ; puis, se lançant au milieu des vagues, il nagea vigoureusement, et en fort peu d’instants parvint sur la roche, où il se trouva tout à fait en sûreté.

Quelques minutes après cet heureux abordage, les pauvres naufragés devinaient, à la tension du câble, que le radeau était amarré. Ce fut alors qu’Arthur opéra de la même façon que Wilkins, afin qu’une seconde corde rendît plus sérieux cet ancrage fictif.

En arrivant près de Wilkins, Arthur Mayburn s’aperçut que le récif était bien plus large et bien plus sûr comme refuge qu’il n’avait osé l’espérer. Mieux encore, de l’autre côté il y avait une plage sablonneuse, à laquelle on pouvait parvenir sans se mouiller plus qu’à la hauteur du genou.

« Si nous réussissons à amener ici tout notre monde, dit Wilkins au fils de Max Mayburn, il sera bien facile de nous rendre là-bas en sûreté.

— Comment allons-nous procéder ? demanda Arthur au convict.

– Il faut à toute force que Black Peter nous donne un coup de main. Regardez par là, il y a un passage qui n’est pas obstrué par les brisants nous amènerons le radeau dans cette anse naturelle. Retournons près de nos amis, et avisons à agir comme je l’ai indiqué.

– En effet, répondit Arthur, Black Peter travaillera, ou nous le priverons de sa ration.

– Voilà qui est bien dit, capitaine. Tenez-vous en à cela.

– En route ! » fit-il en se jetant à l’eau.

Arthur suivit l’exemple du convict, et en quelques brassées atteignit le