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VOYAGE

et du mouton provenant des animaux de la ferme ; des volailles de la basse-cour, des pâtisseries fabriquées par Emma, des fruits récoltés au jardin et de la crème ainsi que du lait tiré de la vacherie. Toutes ces gâteries étaient accompagnées de pots d’ale mousseuse, brassée à la ferme en attendant le vin que produiraient les vignes lorsqu’elles auraient donné du raisin.

Tandis que les maîtres dînaient ensemble, Jenny, Ruth, Baldabella et son enfant étaient bien choyés par les gens de la maison. Ces deux dernières surtout restaient ébahies à la vue de tant d’objets nouveaux pour elles.

Wilkins était demeuré dans un coin, le cœur oppressé. Il fallut que Hugues vînt lui parler et lui enjoindre de se raser et de changer de vêtements. Lorsqu’il fut ainsi approprié, le jeune Mayburn l’emmena vers la laiterie, où il lui montra Susanne, prête à lui pardonner et à lui tendre les bras. La joie de ces deux excellents cœurs débordait en paroles saccadées, entremêlées de larmes et de sanglots.

La fin de la journée et la soirée s’écoulèrent tandis que les voyageurs racontaient leurs aventures. Enfin on alla se coucher. Qu’il fut doux le contact des lits moelleux, pour ces infortunés accoutumés depuis longtemps à se reposer en plein air, sur la terre dure !

Le lendemain matin, après une nuit embellie par les rêves les plus heureux, les amis, réunis après tant d’épreuves, allèrent visiter les maisons qui devaient plus tard s’appeler le village Deverell. Ces habitations étaient situés à un demi-mille de la ferme. Il y avait là, groupés ensemble, sur une seule ligne, près de soixante cabanes, aux toits recouverts d’écorce et aux volets peints en vert. Chaque cabane était placée au centre d’un jardinet, et sur le derrière, celui qui l’occupait avait un acre de terre à cultiver pour son usage, une vache, et quelquefois une paire de moutons. Toutes ces habitations étaient propres bien entretenues et très confortables. Trois cents pas environ séparaient ces demeures simples du bord du fleuve. Là, sur une éminence, s’élevait une chapelle très élégante, dont la tour contenait une cloche pour appeler le dimanche les chrétiens à la prière.

Max Mayburn s’agenouilla sur le seuil, et offrit à Dieu une fervente prière. Au même instant la porte du temple s’ouvrait, et un prêtre, a l’air respectable, se présentait pour faire les honneurs de la maison du Seigneur.

« M. Talbot, que je vous présente, fit M. Deverell à ses amis, est venu tout exprès de Melbourne pour répandre les lumières de la foi parmi les sauvages de ce pays.

— Que je suis heureux, répliqua le père d’Arthur, de me trouver avec un aussi digne ecclésiastique ! Plaise à Dieu de me laisser longtemps vivre au milieu de mes enfants et de mes amis ! C’est ici l’antichambre du paradis.

— Nous allons nous construire un grand cottage, avec votre permission toutefois, demanda Hugues au maître de la « ferme des Marguerites ».

– Je permets tout ce que vous voudrez mais en attendant, mes amis, voici, quelle est ma volonté : vous demeurerez avec nous, dans notre habitation, jusqu’à nouvel ordre ; Jack se chargera d’élever une belle demeure pour M. Mayburn et sa famille, et l’on n’oubliera pas dans cette construction une galerie pour y placer tous les spécimens de la faune de l’Australie.

– C’est charmant s’écria Marguerite.