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AU PAYS DES KANGAROUS

leurs hideux camarades les sauvages, parvenaient aux oreilles des voyageurs prisonniers.

Au milieu de ce désordre, Jack put s’échapper et revenir près de ses amis. Il était harassé de fatigue et rempli des plus terribles appréhensions car il comprenait que l’ivresse épouvantable dans laquelle tous les bandits étaient tombés pouvait d’un moment à l’autre les pousser au meurtre.

« Monsieur Arthur, dit-il d’une voix brève, je me suis emparé d’un fusil et de quelques munitions ; Davy va venir nous rejoindre avec une autre arme à feu dès que les coquins seront complètement ivres et dans l’impossibilité de se mouvoir. Il s’agit donc de nous évader sans délai ou nous sommes perdus. Black Peter a déclaré qu’il agirait à sa guise, et vous savez ce qu’il veut faire. S’il n’était pas ivre, il serait déjà ici, la menace à la bouche.

— Hélas ! hélas ! fit Max Mayburn, comment es-tu tombé entre les mains de cet homme sans foi ni loi ?

— Nous l’avons rencontré en chemin, répliqua Jack, monté sur un superbe cheval qu’il avait sans doute volé dans quelque ferme. Il était habillé comme un gentleman et accompagné de trois « coureurs des bois » de son espèce, tous parfaitement montés et équipés. Ils conduisaient un chariot rempli de barils de liqueur, destiné à opérer des échanges pour du bétail qu’ils voulaient aller revendre dans l’intérieur des terres. Peter me reconnut dès qu’il eut jeté les yeux sur moi, et il me demanda ce que vous étiez tous devenus. Le compagnon de route qui m’avait été donné se chargea de répondre à cette question. Vous auriez frémi, monsieur Mayburn, d’entendre sacrer et pester Black Peter contre Bill, qu’il accusait de niaiserie puisqu’il sacrifiait une pareille prise, — la vôtre, — pour une misérable somme de cent livres sterling. « C’est dix fois ce chiffre-là que j’aurais obtenu ! « disait-il. Allons ! je vais me rendre près des sauvages, et leur démontrer que Bill les a trompés. »

« En disant cela, Black Peter avait rejoint ses collègues et leur disait : « Nous allons ramener au campement ces deux hommes, — il parlait du guide et de moi, — et voir ce qu’il y a à faire. » En effet, nous revînmes et Black Peter, en se montrant à Bill, déconcerta celui qui vous a fait prisonnier. J’ai bien vu que demain matin Bill céderait le commandement à Black Peter. Il ne nous restera donc plus de chances de fuir si nous ne partons pas dès ce soir. Eh bien ! Davy, dit-il au convict qui arrivait avec précaution, que se passe-t-il là-bas ?

— Ils sont à la veille de se battre. Cela va commencer entre Bill et Black Peter, qui se sont pris à bras-le-corps et ont été séparés par les trois amis du dernier. Je les ai vus adresser un coup d’œil significatif à Peter, en lui disant que l’on arrangerait les affaires le lendemain matin. Je ne pense pas qu’il soit sage d’attendre jusque-là. Ainsi donc, si vous êtes prêts et que cela vous convienne, profitons de l’obscurité et partons.

— Merci, mon brave homme, dit Arthur nous sommes décidés, et nous désirons fuir : merci de vouloir bien nous servir de guide. Je vous promets solennellement d’obtenir votre pardon de M. Deverell, si nous avons le bonheur d’arriver à la « ferme des Marguerites. » Je me demande seulement comment mon cher père et ma pauvre sœur pourront aller jusque-là.