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AU PAYS DES KANGAROUS

Allons ! crions une fois de plus, se dit-il.

Et sa voix sonore, rendue plus claire par l’absorption des fruits salutaires, retentit au milieu des rochers.

Cinq minutes s’écoulèrent sans aucune réponse ; mais, en regardant au loin, il aperçut une colonne de fumée à l’horizon.

Peut-être, pensa-t-il, ce feu a-t-il été allumé par les indigènes mais, n’importe ! les deux pauvres égarés peuvent être prisonniers de ces noirs : il n’y a donc pas de temps a perdre pour les tirer de leurs griffes.

Arthur arma son fusil, et, sans quitter son sac de figues il se dirigea vers l’endroit où la fumée lui avait apparu.

Atteindre cette place était chose difficile, et le courageux Arthur dut se frayer un chemin à travers des broussailles et des lianes entrelacées de façon à l’empêcher d’avancer sans l’aide d’un coutelas. À la fin cependant il arriva près d’une sorte de niche environnée et protégée par des roches ressemblant aux murs d’une forteresse. Un feu brûlait dans ce trou, mais on ne voyait personne.

« Hugues ! Gérald ! » s’écria Arthur.

À cet appel, le premier des jeunes gens se montra, marchant sur ses mains, vers l’une des fissures du rocher.

« Mon pauvre frère ! es-tu blessé ? demanda Arthur d’une voix émue où est Gérald ? »

Hugues indiqua la niche d’où il était sorti, et d’une voix brisée répondit à son aîné :

« De l’eau ! de l’eau ! »

Sans bien songer à ce qu’il faisait, Arthur pressa le jus d’une figue sur les lèvres de Hugues.

« Dieu soit loué ? murmura celui-ci. Mais, mon bon Arthur, va vite chercher de l’eau pour ce pauvre Gérald. »

Arthur se glissa sous la roche et arriva dans un coin abrité où Gérald était couché, évanoui, ayant à ses côtés un énorme kangarou mort. Arthur offrit au brave garçon les seuls soulagements qu’il eût avec lui, des figues juteuses mais O’Brien paraissait plus faible que Hugues, et l’aîné des Mayburn découvrit que le sang s’échappait d’une blessure qui avait été bandée avec un mouchoir de poche.

« Qu’est-ce que c’est que cela ? demanda-t-il à son frère. Comment Gérald s’est-il blessé ?

— C’est le kangarou qui l’a mis en cet état, répondit Hugues. Lorsque nous avons eu achevé la bête, O’Brien s’est senti trop souffrant pour la dépecer et nous préparer à souper. Hélas ! nous n’avons rien mangé depuis notre départ.

— Je ne sais que faire, observa Arthur. Il ne me semble pas possible de vous transporter aux grottes ce soir, faibles tous deux comme vous l’êtes. Ah ! que notre pauvre père doit être alarmé en ne me voyant pas revenir !

— Tu vas donc nous laisser ici mon bon Arthur ? Si ce malheureux Gérald allait mourir !

— Je te quitte, mais pour revenir bientôt, répondit Arthur. Il me faut