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AU PAYS DES KANGAROUS

Du côté du sud-ouest, une grande ligne noire à i’horizon indiquait la bordure d’un fleuve : c’était là que se portaient toutes les impatiences des voyageurs. Aussi après un temps de repos fort court, la petite troupe s’avança à travers une plaine couverte de plantes rares, dont l’aspect était nouveau pour les voyageurs. Ils y retrouvèrent avec joie l’avoine aux épis mûrs, dont ils remplirent d’énormes sacs sans cesser de marcher.

Max Mayburn pleurait de joie, et remerciait la Providence, qui leur prouvait qu’elle n’abandonne jamais ses enfants. La petite Nakina, qui se trouvait près du vieillard, murmura les premiers mots de la prière : « Notre Père, qui êtes aux cieux, » et les voyageurs achevèrent l’oraison commencée par l’enfant.

Enfin l’on atteignit les berges d’un fleuve coulant à pleins bords, et Arthur, de concert avec Jack déclara que l’on allait couper des écorces d’arbres afin de construire deux canots. On s’occupa aussitôt de ce soin, car la dépouille des arbres devait sécher pendant la nuit.

Tandis que les jeunes gens aidaient le constructeur et préparaient des cordes, Baldabella s’en alla harponner deux superbes poissons de l’espèce « mulet » et rapporta une masse de moules qui servirent au souper.

Et chacun se coucha sur des lits de bruyère en se couvrant de fourrures, car les nuits devenaient très fraîches.





CHAPITRE XXV

Nouvelle construction de canots. — Sottises de Ruth. — Le feu dans les bois. – Dangers sur la terre et sur l’eau. — La jeune fille blessée. — Une demeure au milieu des montagnes. — L’arbre-bouteille. — Chasse aux abeilles. – La gousse à café. — Les chasseurs égarés.


Les cris de l’oiseau moqueur, qui annonçaient le lever du jour d’une façon aussi régulière que les croassements du corbeau en Angleterre réveillèrent les travailleurs, et dans l’espace de cinq heures les deux canots furent achevés.

Pendant ce temps-là, les femmes s’occupaient à cueillir des plantes sèches pour servir de litière, lorsque Marguerite entendit Ruth, qui s’était écartée dans les bois, crier d’une façon terrifiante :

« Ils m’ont vue ! ils m’ont vue !

— Maladroite ! répliqua la fille de Max Mayburn, où donc es-tu allée ? qui donc t’a vue ?

— Les noirs, les sauvages, répondit la jeune fille. Je coupais de l’avoine pour mes poules, lorsque j’ai entendu leur coo-ee; j’ai alors levé la tête, et j’ai aperçu ces horribles visages là-bas ! Ils criaient comme des sourds, et je me suis sauvée. Je crains bien qu’ils n’aient entendu ma voix. »