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AU PAYS DES KANGAROUS





CHAPITRE XXIV

La sécheresse du désert. – Désespoir. – L’eau arrive à la rivière. – Défaite des sauvages. – La faim et la soif. – Les pas imprimés dans la faille. – La mare. – Le télégalle et son nid. – La vallée fertile. – Le fleuve se dirigeant vers le sud.


Les pauvres voyageurs erraient véritablement dans un désert, une sorte de Sahara, couvert de buissons desséchés. Aussi loin que les yeux pouvaient s’étendre, on ne voyait pas même un arbre, deci, delà, pour varier la monotonie du paysage.

De temps à autre, tout en traînant le véhicule d’écorce qui contenait les paquets, ils apercevaient dans le lointain un rideau de roseaux qui semblait border les rives d’un ruisseau ; mais quand ils s’étaient approchés, ils se trouvaient en présence, ou d’un lit desséché, ou d’un fossé dont les terres n’étaient humectées que par les pluies des jours précédents.

Les seuls êtres animés qui se trouvaient dans ces endroits étaient quelques émeus. Ils couraient si vite, qu’on ne pouvait les atteindre ; car la fatigue, l’épuisement, accablaient chacun des malheureux voyageurs.

Deux jours de suite ils s’avancèrent sur ces plaines couvertes de bruyères ; leur provision d’eau était épuisée, et les galettes, les pommes de terre, leur paraissaient impossibles à avaler.

Pauvres égarés ils marchaient lentement, perdant presque l’espérance et le jour suivant ressembla à celui qui l’avait précédé.

Lorsque le soir de ce troisième jour arriva, Max Mayburn se laissa choir par terre.

« Dieu, dans sa sagesse, dit-il à ses enfants, a voulu mettre fin à nos maux dans ce lieu désert ; préparons-nous à mourir et prions.

— Vous vous trompez, mon père, répondit le courageux Arthur. Dieu nous dit de ne pas nous abandonner au désespoir, car jusqu’ici il ne nous a point délaissés. Ma bonne Marguerite, toi qui es croyante et forte, encourage notre père.

— Hélas ! mon cher frère, je me sens mourir laisse-moi ici, mais emporte notre père, sauve-le ! sauve-le !

— Je t’en supplie, ma bien-aimée, reprends tes forces. Relève-toi, continua le frère en prenant les mains de sa sœur. Je suis certain que la pluie tombée hier a dû rester dans quelques creux de terre ou des rochers. Nous devons marcher pour éviter les ennemis qui sont à notre recherche et fuir la mort qui nous environne. Avant toutes choses, il faut passer de l’autre côté de cette rivière boueuse et la mettre entre nous et les sauvages.