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VOYAGE

père, Jenny et Ruth vont te suivre ; Baldabella et son enfant se rendront aussi là-haut. Nous serons assez nombreux pour défendre la grotte.

— Mais Marguerite suffira pour faire le guet, moi je préfère être du nombre des combattants.

— Tu te contenteras, mon ami, fit Arthur, de me servir d’aide de camp et de m’apporter les nouvelles des découvertes faites par ma sœur. Hâtez-vous, partez ! »

Chacun obéit à ces ordres, et bientôt Gérald vint apprendre à Arthur que Black Peter, suivi par les sauvages, s’avançait sur la montagne, examinant le sol avec une perspicacité sans pareille. Une pomme de terre oubliée qu’il avait ramassée, le réservoir à eau construit par les jeunes gens et qu’il avait découvert, tout était un indice pour le convict, qui racontait ses découvertes à ses amis les indigènes.

Ceux-ci, sans rien dire, examinaient les rochers tout autour d’eux, comme s’ils se fussent attendus à voir tout à coup quelque démon surgir de dessous terre. Ils reculèrent sérieusement en apercevant le rocher de la grotte où se cachaient les assiégés.

« Les noirs ont peur de Bayl-yas, le mauvais esprit, dit alors Baldabella, qui voyait ce qui se passait.

— Voyons, Marguerite, fit Gerald, laisse-moi leur faire peur : je vais les mettre en fuite. »

Et en parlant ainsi, il poussa un grognement à terrifier le diable.

Les sauvages reculèrent, et il fallut la voix impérieuse de Black Peter, leur chef, pour les ramener près de lui. Le convict n’avait pas tardé à découvrir d’où venait le bruit entendu, car il désignait à ses camarades le pic élevé où les prisonniers se cachaient.

« Quelle imprudence vous avez commise, Gérald ! dit Marguerite à O’Brien. Rendez-vous près d’Arthur et dites-lui ce qui se passe. Les sauvages ne quitteront pas la place avant d’avoir découvert l’endroit où nous sommes réfugiés. »

Gérald, désolé de sa folie, se hâta d’aller raconter à Arthur ce qui avait eu lieu, en lui confessant sa faute. Le fils aîné de Max Mayburn vit bien qu’il faudrait infailliblement se servir de son fusil. Il ordonna à Hugues de ne tirer que quand il aurait, lui, fait feu de ses deux coups. À ce moment-là seulement, il tirerait pendant qu’on rechargerait l’arme. Wilkins et Jack se chargeaient de ce soin-là.

La nécessité forçait Arthur de commettre un acte de cruauté ; mais il s’agissait de légitime défense, et il fallait, de toute façon, se débarrasser de l’infâme Black Peter.

Les sauvages avaient déjà retiré deux des pierres qui couvraient les crevasses de la grotte, mais Peter ne savait pas encore par où pénétrer dans l’intérieur. À la fin cependant il trouva la large dalle que ses compagnons arrachèrent du trou qu’elle recouvrait. Il savait enfin à quoi s’en tenir.

Les noirs se refusaient à aller en avant ; ils hésitaient à perdre inutilement leurs flèches dans l’obscurité.

C’est alors que Black Peter, s’inclinant au-dessus de l’ouverture, cria à pleins poumons :