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VOYAGE

parie que nous allons trouver de la poudre et des balles, ce qui vaut bien mieux dans notre position. Regardez, monsieur Arthur, vous qui êtes instruit. Ne voyez-vous pas les cachets d’un navire de la marine anglaise ?

— En effet, répliqua celui-ci ; je trouve aussi la date de l’époque où cette cache a été pratiquée : il y a de cela trois ans. Il est probable que ceux à qui ces objets appartenaient ne reviendront jamais les chercher ici.

— Tant mieux pour nous, fit Wilkins. Les trouveurs sont les gardeurs, n’est-ce pas, monsieur Arthur ? »

Le fils aîné des Mayburn ne répondit rien, et adressa un regard à son père.

« Les proverbes du monde, observa celui-ci, ne sont pas toujours les paroles de Dieu. Mais, en ce cas, comme les munitions de guerre appartiennent certainement au gouvernement anglais, mon avis est que nous pouvons nous approprier une partie de ce que contient « cette cache ». Ne penses-tu pas ainsi, Marguerite ? Nous laisserons ici une reconnaissance de ce que nous aurons pris, ou plutôt emprunté. Si le Ciel nous conduit à bon port, nous rendrons compte à qui de droit de ce qui s’est passé aujourd’hui.

— C’est parfaitement dit, cher père, » répondit Marguerite Mayburn.

Wilkins sans se préoccuper de toutes ces paroles, avait pris sur lui de transporter les petits barils et les sacs dans les canots.

« Gardez seulement ce qui nous sera utile, lui dit Marguerite. Qui peut dire quels seront nos besoins de munitions ? répliqua le convict. Nous avons encore une longue route à parcourir, et nous serons bien forcés de nous défendre contre des coquins bien plus dangereux que des sauvages, les « rôdeurs des bois ».

— Mon père va écrire au crayon une note dans laquelle il reconnaîtra que nous avons emporté la moitié du dépôt, en expliquant la position dans laquelle nous nous trouvons. »

En effet, Max Mayburn ayant tracé cette déclaration, on l’enferma dans une enveloppe d’écorce solidement ficelée que l’on attacha à l’un des sacs replacés dans le trou. Cela fait, on combla la fosse, et l’on étala avec soin le gazon, de façon que les indigènes ne pussent point à leur tour découvrir la cache.

« Il faudra prendre garde de mettre le feu à notre arsenal, observa Arthur, et aussi de mouiller la poudre, car alors notre riche et inappréciable provision deviendrait chose inutile. Je suis de l’avis de Wilkins ; nous allons prendre le chemin à travers bois. Certainement ce pays est fort pittoresque mais je préférerais nous voir tout à fait cachés par les arbres de la forêt.

— Regarde là-bas, vers le sud, dit Hugues à son frère ; j’aperçois un point noir qui ressemble fort à une zone boisée. Si nous quittons la rivière, nous aurons là un point de repère très facile à retrouver. Qu’en dis-tu ? Allons-nous là-bas ? »

Arthur examina avec attention la forêt lointaine que lui désignait son frère, et comme il n’y avait pas de fumée dans les environs, tout portait à croire que les noirs ne se trouvaient pas dans ces parages.