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AU PAYS DES KANGAROUS

et je me suis concerté avec Black Peter et les autres pour fuir dans le désert. Hélas voyons, veuillez me dépeindre cette passagère de l’Amoor.

— Elle était blonde, elle avait des yeux bleus et un teint blanc et coloré. Son langage était celui des paysans du Nord.

— Que Dieu me pardonne mes fautes et me ramène près de cette femme ! C’est bien elle, c’est bien ma Susanne, s’écria Wilkins, dont les pleurs redoublèrent. Si jamais nous nous trouvions en contact de nouveau avec Black Peter, monsieur Arthur, attachez-moi, bouchez-moi les oreilles, bandez-moi les yeux, pour que je ne le voie pas, et que je n’écoute plus ses mauvais conseils.

— Priez plutôt Dieu pour qu’il vous donne la force de résister à la tentation, ajouta Max Mayburn ; il exaucera vos vœux.

— Hélas ! je ne sais pas prier, moi, répliqua Wilkins ; n’importe, j’essayerai ; vous m’apprendrez, vous qui êtes un brave et digne homme. J’espère que le Seigneur me donnera la force de ne plus vous quitter. »

La question de conserver la négresse et son enfant avec les voyageurs fut vite décidée par l’affirmative. La nouvelle venue se coucha donc dans le fond de l’un des canots, en serrant son enfant sur sa poitrine.

Le fleuve était très calme, et les trois embarcations se dirigèrent sans accident loin du lieu de carnage des indigènes australiens.

Il était temps de quitter ce rivage inhospitalier, où les sauvages devaient indubitablement revenir bientôt pour reprendre leurs armes et ensevelir leurs morts.

Et enfin la veuve faisait comprendre, par l’interprète Wilkins, que sa vie et celle de son enfant couraient le plus grand danger.





CHAPITRE XVI

La mère et l’enfant. — L’intérieur du pays. — Une autre cataracte. La troupe des pèlerins. – Ascension difficile. — Le lézard à jabot. La chasse aux kangarous. – La route d’Érin.


C’est en s’éloignant du lieu de carnage où elle laissait le corps de celui qui était le père de son enfant, que la sauvagesse de l’Australie raconta toute son histoire et les menaces de Black Peter contre sa personne et celle de son cher bébé.

Max Mayburn conclut du récit de cette femme que les Australiens vivaient en famille, en clans, plutôt qu’en tribus, et il y avait un chef à la tête de chaque réunion d’individus. La veuve lui apprit aussi que ses frères n’avaient pas de maisons, qu’ils vivaient et dormaient en plein air tant qu’il faisait beau, et se retiraient dans les grottes à l’époque des pluies.