Page:Revoil Voyage au pays des Kangarous 1885.djvu/113

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
110
VOYAGE

nous trouverons là sans doute quelque grotte pour nous réfugier, et, tout en marchant, nous récolterons des œufs pour souper. »

Arthur avait sagement parlé ; la récolte dans les nids fut copieuse ; on tua même quelques oiseaux, et l’on découvrit une grotte assez spacieuse pour servir de logement, de cuisine et de forteresse contre toute attaque ennemie.

Tandis que les voyageurs devisaient ensemble en prenant leur repas, un coo-ee éloigné vint leur apprendre que les sauvages ne les avaient pas perdus de vue. Ils se hâtèrent d’éteindre leur feu et se retirèrent dans le fond de la caverne, convaincus de pouvoir ainsi échapper à la découverte des indigènes.

Dès que le jour parut, Jack se mit au travail de la construction des canots, travail que le voisinage des noirs rendait urgent. Hugues et Gérald, qu’il réveilla, s’empressèrent de l’aider, et pendant ce temps-là Arthur se dirigeait vers le fleuve, afin de trouver un endroit favorable pour le traverser.

Il lui parut impossible d’aborder de l’autre côté, car les rives se trouvaient de niveau avec les hautes palissades de roches perpendiculaires. Le courageux chef de la petite troupe remonta alors le fleuve sans mieux rencontrer ce qu’il cherchait. Il revint donc au campement afin de hâter l’heure du déjeuner et d’emmener tout le monde en amont du fleuve, de façon à découvrir le passage souhaité. Le repas achevé, chacun reprit son fardeau, et l’on n’oublia pas non plus l’ébauche du canot, qui devait être terminée lorsque le moment opportun serait venu.

Déjà les voyageurs avaient franchi deux milles, lorsque Marguerite montra à son frère un sentier ouvert à travers les mangliers et aboutissant au fleuve, où l’on devait trouver un passage plus facile, et peut-être une place pour s’embarquer et arriver sain et sauf sur l’autre berge.

« Traversons vite le marais, dit Arthur à sa sœur, pour parvenir à cet endroit ; nous calmerons ainsi les inquiétudes paternelles, qui influent sur mon énergie. »

Arrivé sur le bord du fleuve Arthur fut en quelque sorte mis en défiance à l’aspect de l’entourage touffu de cette partie du territoire australien.

« Marguerite, dit-il alors à sa sœur, tu trouveras, avec mon père et les autres, un excellent refuge sous ces mangliers recouverts de lianes ombragées. Mon désir est que tu restes en cet endroit, tandis que nous, les jeunes, nous irons en reconnaissance. »

Marguerite sentit son cœur gros en voyant son frère prêt à mettre ce projet à exécution.

« Surtout, dit-il encore, empêchez Ruth de bouger, de pousser le moindre cri, un soupir même, quoi qu’elle voie, quoi qu’il arrive. Bonne espérance et au revoir »

Sur l’ordre d’Arthur, les jeunes gens se mirent en marche. Parvenus à l’issue du sentier, ils aperçurent des arbres brûlés et un certain espace défriché.

Avant qu’ils eussent eu le temps d’examiner la position et de décider s’il