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AU PAYS DES KANGAROUS

À chaque instant les voyageurs effarouchaient de nombreuses volées d’oiseaux aquatiques, parmi lesquels de superbes grues au plumage admirable, que Max Mayburn suivait dans l’espace. D’autre part, le passage des naufragés soulevait des myriades d’insectes dont les piqûres étaient fort désagréables mais l’espoir de conquérir la liberté faisait oublier ces inconvénients.

En effet, toute la journée fut employée à franchir cette fondrière, et le soleil descendait derrière l’horizon lorsque les voyageurs parvinrent sur la lisière, devant un arbre aux feuilles larges et semblables à celles du noyer, essence très rare en Australie.

Les jeunes gens se mirent alors en chasse, et rapportèrent des canards sauvages pour le repas du soir. Max Mayburn et tous ceux qui l’entouraient adressèrent à Dieu des actions de grâces et chacun chercha ensuite dans le repos l’oubli et la réparation de ses fatigues.

Le lendemain, dès le matin, on se remit en marche, en s’appuyant sur des bâtons que les jeunes gens avaient coupés pour chacun, et on eut pu les prendre pour des pèlerins se rendant à quelque chapelle lointaine.

Il leur fallut encore traverser des marécages ; mais, grâce à leur appui, ils purent franchir ces obstacles le cœur gai et sans trop de fatigues.

Très souvent les jeunes chasseurs voyaient des kangarous bondir devant eux, des opossums s’élancer dans les branches des arbres, et bonne envie leur prenait de les poursuivre.

« À quoi bon ? disait Arthur : ne sommes-nous pas assez chargés ? Il nous serait impossible de porter autre chose sur nos épaules. Prenez patience jusqu’au moment où nous arriverons à l’endroit où nous ferons halte. Il y a tant de gibier dans ce pays-ci, que nous trouverons aussitôt à nous approvisionner. Mais, attention ! nous nous éloignons des montagnes, et nous enfonçons de plus en plus au milieu des marécages. Mon avis est de nous porter à l’ouest, et de tenter l’ascension du sol élevé avant de nous arrêter pour passer la nuit. »

Ce n’était pas chose facile que de gravir ces montagnes, couvertes de broussailles, par une chaleur étouffante ; mais, quand nos voyageurs atteignirent le sommet, ils furent récompensés de leur peine par la vue d’une ravissante vallée dont le niveau était plus bas que celui du pays qu’ils avaient parcouru, et qui était couverte de monticules verdoyants, d’arbres géants sous lesquels poussait un gazon épais, émaillé de fleurs de toutes couleurs dont les parfums pénétrants embaumaient l’atmosphère.

Des perroquets au plumage chatoyant se jouaient au milieu des arbres, faisant entendre des cris rauques interrompus quelquefois par des sons mélodieux provenant d’un oiseau inconnu ; des ruisseaux sans nombre sillonnaient de toutes parts cette plaine, qui rappelait le paradis, et à l’extrémité de laquelle Arthur aperçut un grand courant d’eau.

« Il nous faudra traverser encore ce fleuve, observa Hugues : ainsi, mon cher Jack, vous aurez à nous construire encore quelque embarcation.

— Pourquoi, ajouta Max Mayburn, ne nous établirions-nous pas au milieu de, ce vallon, image du paradis terrestre ? Nous élèverions une hutte