Page:Revoil - Les Exiles.djvu/173

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

fois l’initier encore aux misères incurables et aux douleurs sans nombre qui déchirent l’humanité. Pour cette vie constamment riante, le malheur avait été un livre fermé. Si la jeune duchesse entendait parler parfois des souffrances des pauvres, elle les secourait de loin, sans les voir, sans en être frappée ; elle y compatissait matériellement, si je puis m’exprimer ainsi, mais non avec cette émotion qui vient du cœur, qui double la charité ou plutôt qui est toute la charité. Pour bien se pénétrer des peines d’autrui, il faut avoir souffert soi-même ; or, depuis sa naissance, aucune douleur un peu vive n’avait pénétré dans le cœur aimable, mais léger de l’heureuse femme. Son mari, qui parcourait une brillante carrière dans la diplomatie, s’occupait beaucoup d’affaires, et voyait plus souvent la duchesse dans le monde que dans l’intimité. De là cette absence d’une affection