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D I A L O G V EI.

a voulu par cy deuant faire entendre, de la part de ſa ſainc‍teté, la vie & les abus d’icelle leur eſ‍tãs par trop deſcouuerts & cognus.
Ne doutez pas auſsi, que la Royne mere n’accompliſ‍ſe ce qu’elle promit au duc d’Albe, pour le roy d’Eſpagne à Bayõne : de rompre les edic‍ts de paix, & ruiner les Huguenots de la France, auec la peau du lion, ou auec la peau du regnard.
Conſiderez, que le Roy depuis douze ans en ça a eu des maiſ‍tres & inſ‍tituteurs qui l’ont apprins à iurer, blaſphemer, ſe periurer, paillarder, diſsimuler ſa foy, ſa religion, ſes penſees, eſ‍tre maiſ‍tre de ſon viſage, & qui l’ont ſur tout nourri à aimer de voir du ſang commençant par des beſ‍tes, & acheuant par ſes ſuiets.
Prenez garde, que le Roy a eſ‍té perſuadé par la doc‍trine de Machiauelli, qu’il ne faut pas qu’il ſouffre en ſon Royaume, autre religion que celle ſur laquelle ſon eſ‍tat a eſ‍té fondé : de laquelle, voire de ſes faux miracles, il faut qu’il monſ‍tre faire compte : Aſ‍ſeurez-vous qu’on luy a enſeigné & ſouuent repeté ceſ‍te leçon, que ſon Royaume ne peut eſ‍tre paiſible & aſ‍ſeuré, cependant qu’il y aura deux religions.
Notez qu’on a pluſieurs fois fait entendre au Roy, que les Huguenots le vouloyẽt tuer, & pour le luy mieux perſuader, luy ont fait voir des lettres de menees & deſ‍ſein, ſuppoſees & fauſ‍ſes : & au reſ‍te i’ay ſceu de bonne part, que le iour que la royne de Nauarre arriua à Bloys, il dit à ſa mere : Ne ioue-ie pas bien mon rollet, Madame ? Ce

n’eſ‍t rien fait, reſpondit-elle, il faut acheuer. Par

C.iii.