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D I A L O G V EI I.

oſ‍te ſon Chandelier du milieu d’eux, & leur face ſouffrir la faim, ie dis la faim de ſa parole vraye paſ‍ture des ames, puis qu’ils en abuſent ainſi ? Et ceſ‍te Princeſ‍ſe leur Royne, qui a la reputation d’eſ‍tre tãt ſage & vertueuſe, qui porte le titre de chef de l’Egliſe en ſon Royaume, & de deffẽſatrice de la foy. Eſ‍t-il poſsible qu’elle & les ſeigneurs de ſon Conſeil endurent vne telle desbauche en la maiſon du Dieu viuant ?L’hi. Ce n’eſ‍t pas là tout, Il y a biẽ encore pis à craĩdre. Le pol. Noſ‍tre Seigneur ! qu’y pourroit-il auoir de pire, entre ceux qui ont receu l’Euãgile, que de n’ẽ vouloir (par maniere de dire) que la moitié, à ſc.la ſeule doc‍trine ?

L’hi. Ne ſeroit-ce pas choſe plus deplorable , ſi encores de ceſ‍te moitié-là ils en faiſoyent ſi peu d’eſ‍tat, qu’ils ne ſe ſouciaſ‍ſent, quand bien auiourd’huy ou demain elle leur ſeroit oſ‍tee.

Le pol. Cela eſ‍t bien certain.L’hi. Or ſont-ils preſque ſur le point de la perdre s’ils ne s’auiſent.

Le pol. Ie ſerois extremement marri, quoy que le peuple qui en abuſe ſoit digne d’en eſ‍tre priué, ſi ce que tu dis auenoit : Mais dy moy comment ce peut eſ‍tre. L’hi. ll ne faut que la ſeule mort de la Royne, pour tout chãger & rẽuerſer. Le pol. Cõment, Bon Dieu! En 14. ou 15. ans qu’elle a regné, n’a-elle ſceu eſ‍tablir telles loix & ordõnãces que la doc‍trine de l’Euãgile puiſ‍ſe demeurer pure apres ſõ deſpart bõ gré mal gré la Papauté ? A-elle ſi peu profité en la lec‍ture des bõs liures, que i’entens luy eſ‍tre tãt familiers ? Faudra-il qu’vn Cicero luy enſeigne ſa leçon, ſurpaſ‍ſant de zele enuers la Republique Romaine, le zele de ceſ‍te Royne, enuers l’Egliſe de Dieu ?