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et le clergé, les places même qu’ils occupaient étaient une récompense de leur infidélité pour leur prince.

Les plus coupables, c’est-à-dire les principaux de la ville, concertèrent ensemble les moyens de prévenir le coup dont ils se sentaient menacés. Dans plusieurs assemblées secrètes qu’ils firent chez le grand bailli du Cambresis et chez le prévot de la ville, ils convinrent facilement que le plus sûr moyen de se maintenir dans leurs charges, était de dépouiller l’archevêque du droit d’en disposer, en le transférant au Roi d’Espagne, avec la souveraineté de Cambrai. Il fallut imaginer des prétextes, ceux qui plurent davantage étaient que l’archevêque ne pouvait, par ses seules forces temporelles, conserver ses états, secondement que le tilie de protecteur ne pouvait suffire au Roi d’Espagne, pour empêcher de retomber dans les malheurs dont on venait d’être délivré par ses armes, parce que la pluralité des princes est une occasion de troubles.

Sitôt qu’on eut fait ouverture au comte de Fuentes de ces projets flatteurs pour un ministre victorieux, qui cherchait l’occasion de réparer par l’acquisition d’une nouvelle province, les pertes que l’Espagne faisait du côté de la Hollande, il ne se fit pas un scrupule d’accepter ce qu’on lui offrait. De pareilles raisons parurent cependant bien frivoles.

« Les archevêques de Cambrai s’étaient maintenus pendant plusieurs siècles sans le secours de personne[1], et n’avaient point eu besoin de

  1. Cette assertion est démentie par l’histoire de Cambrai ; plusieurs prélats durent recourir à différens princes pour se maintenir sur le trône épiscopal ; je citerai :

    1o Berengaire, nommé à l’évêché de Cambrai en 957, qui demanda des secours contre les Cambresiens à l’empereur Othon et au comte de Flandre, et s’en servit pour décimer les bourgeois ;

    2o Gérard II, neveu et successeur du vertueux Liébert, en 1076, implora l’intervention de l’empereur, des comtes de Flandre el de Hainaut, pour entrer à Cambrai, sous des conditions qu’il ne tint pas. Il fit tuer par ses hommes d’armes un grand nombre de bourgeois, et força les autres de renoncer à la commune ;

    3o Jean de Béthune, évêque en 1200, ne put se maintenir sur le siège épiscopal que par la protection des empereurs Othon et Frédéric ;

    4o Godefroy de Fontaine, successeur du précédent en 1219, eut recours à la même puissance pour soumettre les bourgeois de Cambrai ;

    5o Nicolas de Fontaine, évêque en 1248, ne put maîtriser les bourgeois de la ville, malgré l’intervention de l’empereur Richard, etc., etc.