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opiniâtrement à vendre leur blé contre ce mode de paiement ; ils s’obstinèrent au point que le magistrat fut contraint de faire exécuter son commandement vis facti, faisant ouvrir les greniers et y prenant le blé selon la taxe mise. Les bourgeois étaient extrêmement vexés par les corvées qu’on les contraignait de faire, et néanmoins rien n’avançait à cause de la confusion des commandemens. Balagny faisait courir le bruit qu’il lui venait un secours de 5 ou 4,000 hommes, ce qui épouvantait les bourgeois, parce que les soldats de la ville se vantaient publiquement qu’aussitôt que le secours serait arrivé, ils les dompteraient, les pilleraient et coucheraient avec leurs femmes et leurs filles ; d’un autre côté les Espagnols criaient du bord des fossés, que lorsque la ville serait prise, ils en feraient autant et brûleraient les maisons, de sorte que les pauvres bourgeois ne voyaient aucune chance de salut et avaient le cœur horriblement serré.

On tirait sans cesse du camp des flèches avec des lettres qu’on disait être de notre archevêque Berlaymont, admonestant le peuple et l’engageant de lui ouvrir les portes, ce que le peuple désirait extrêmement ; on le voyait et on l’entendait par leurs gestes et par leurs propos ; mais le magistrat et quelques puissans de la ville le retenaient, tant par des menaces, que par de vaines promesses ; c’est pourquoi on n’osa rien attenter. Je vous laisse à penser en quelle peine et altération étaient les bons citoyens, voyant devant leurs yeux un glaive tranchant des deux côtes, et ce qui les tourmentait davantage était la monnaie de cuivre avec laquelle ni soldats, ni habitans ne pouvaient trouver ni pain, ni vin, ni autres choses nécessaires à la vie humaine, et plusieurs offraient 500 florins pour un de bonne monnaie.

Le mercredi 6 septembre, ceux du camp firent une grande salve sur le soir, le lendemain matin