Page:Retinger - Le Conte fantastique dans le romantisme français, 1909.djvu/85

Cette page n’a pas encore été corrigée

— 83 —

dans l’amour, comment pourrait-il croire aux superstitions ?

C’est un sceptique endurci. Non seulement il n’est d’aucune religion (i), mais il n’a pas même la religion de soi-même. Et ses lecteurs ? G ’étaient ou des gens pareils à lui, mais cent fois plus cyniques, comme Stendhal et Ampère, ou la haute société du second Empire qui pensait seulement au plaisir. Le gros public ne compte pas pour lui, puisque non seulement il se moque de lui, mais lui cache même ses œuvres ; combien de fois imprimat-il « privately », et quand il imprimait publiquement, il se souciait peu de ses éditions. Voilà que les deux conditions sine qua non de Nodier ne sont pas remplies et cependant les contes fantastiques de Mérimée comptent parmi les meilleurs qu’on ait écrits en France. Pourquoi ? La seule réponse qui se présente est qu’il fut un artiste incomparable, qui possédait à fond son métier d’écrivain et que le génie ne connaît pas de règles.

(i » Il se vantait de n’avoir jamais été baptisé. Cf. Filon. P. Mérimée, Hachette, 1898.