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XXIII
SON ŒUVRE ET SA PORTÉE.

ou idées d’un honnête homme sur un projet de règlement pour les prostituées, propre à prévenir les malheurs qu’occasionne le publicisme des femmes. » C’est un travail qui, malgré le sujet traité, est écrit d’une façon décente et ne peut troubler l’esprit le plus timoré. Etant admise la nécessité du « publicisme, » comme Restif appelle cette plaie toujours ouverte au flanc des grandes agglomérations d’hommes, on ne peut guère accuser les règlements proposés que de provenir d’une trop grande sollicitude pour la santé des femmes renfermées dans le Parthenion qui leur est consacré et pour la satisfaction de ceux qui viennent les y visiter. Toutes les précautions sont ingénieuses et dictées par la prudence, et certes, si Fourier avait eu à cloîtrer ses bacchantes et ses faquiresses au lieu de les laisser se livrer ouvertement aux mœurs phanérogames, il ne s’y serait pas pris autrement pour contenter les attractions passionnelles des hommes vers un œil bleu, une taille élancée, un pied mignon, etc.

Cette première tentative, à laquelle collabora, dit-on, Linguet, fut suivie d’une autre, celle de la réforme du théâtre ou de l’actricisme. La Mimographe parut en 1770. Le Pornographe n’avait pu être mis au jour que sur l’autorisation obtenue de M. de Sartine, par sa maîtresse, MMe Poissonnier, que connaissait Restif ; la Mimographe n’eut point à souffrir de difficultés, aussi l’ouvrage n’eut-il pas le même succès. C’est un bon livre d’ailleurs, plein de choses et de faits, et auquel a probablement travaillé Nougaret, avec qui Restif n’était pas encore brouillé[1]. Comme il ne touche qu’à une profession spéciale et non aux mœurs de la société en général, nous n’en dirons qu’un mot, c’est que Restif, toujours conséquent avec lui-même et poursuivant sans cesse ce but : le bonheur dans le mariage, conduit l’épouse de M. d’Alzon sur la scène. Elle combat ainsi l’amour de son mari pour une actrice ; et, suivant l’auteur, on pourrait, par des moyens analogues, peupler les théâtres de femmes

  1. Si on s’en rapporte au Paysan perverti, la cause de cette brouille pourrait être rapportée à une lettre écrite par Nougaret (dans le Roman), sous le nom de N’Egrèt, au frère d’Edmond, lettre dans laquelle il est question de la conduite du jeune homme (qui roprésente Restif) à Paris.