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LES HUIT PETITES-MARCHANDES

212 LES HUIT PETITES-MARCHANDES (s'écria la Poudrière-Pommadière), l'grand v'nez- y-voir! - Mais ça n'est pas comme l'entend m. le Comte, reprit lá Jolie-Modeuse. - Vrai ou faus, j'vas vous conter mon histoire, moi, qu'monsieu I'Comte prendra comme i'voudra. VI. LA PETITE-POUDRIÈRE-POMMADIÈRE. -J'sis honnete-fille ; mais je n'lai pas toujous- été : c'est un malheur, et c'est un bonheur que j'me sois-r'tirée du vice. J'sis Fille d'une Blan- chisseuse de la rue Perdue. J'avait tant d'peine dans ma jeunesse, qu'ça-f'sait-pitié. Aussi, quand j'passais chargée d'linge pour aler au bateau, Ceux qui m'rencontraient, m'disaient: Monguieu! quée dommage! la Jolie-enfant-! Moi, qui enten- dait ça, j'disais : On m'plaint bén; mais Per- sonne n'men-r'tire-. Mais v'la qu'unjour, comme j'descendais les Grands-d'grés, qu'une Femme du Faubourg-Saintmarceau, qu'on appelait la-Mou- charde, et que je n'connaissais pas, m'r'garda beaucoup : Monguieu, mon Enfant, à vote âge, porter des charges comme ça!... Si vous vou- lez vinir avé moi, vous en aurez d'pûs douces-? J'lli dis, que je n'demandais-pas-mieus, si ma Mère le voulait. Hâ! vous avez une Mère? Vous lui êtes utile; a'n'voudra pas : ç'pendant, vous man- quez vote bonheur : car vous êtes d'une jolie-fi- gure! Parlez-lli, Madame. - Où est-elle? - All' est toute seule cheû nous-. J'lli montra note porte, a'monta, et j'ala faire mon voyage; mais je revins su'-le-champ, pour voir ce qui se passait. Je trouvai la-Moucharde assise, et ma Mère, qui lui parlait à-demi-mots : quand a'-m'vit : -- Alons, Javote, pisqu'tu veux-bén aler aveu Madame, t'i- ras: tu n'as qu'à t'chausser et à mettre ton casa- quin d'indiénne; a'va t'enmener; j'aime mieus —