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et lorsque mon devoir était achevé, il me le faisait lire. Il ne me reprenait, qu’en lisant dans son livre la fable Française, phrase pour phrase. Il me dictait ensuite une fable entière en Français, pour la mettre en Latin. La manière était ici la même : je lisais mon Latin ; l’abbé Thomas me corrigeait, en me lisant celui de Phèdre. Je me rappelle que dans celle de l’Ane et du Lion chassants j’avais traduit Oreilles par Aures, et que ce fut avec la plus grande surprise, que j’entendis dans Phèdre le diminutif Auriculas[1] ! droit et naïf encore, je n’en pouvais revenir ! Ce fut à cette occasion, que l’abbé Thomas me donna la première idée de l’ironie : je trouvai cette figure très ingénieuse ; mais elle ne me plut pas, comme on s’y attendait, et elle ne me plaît pas encore.

Je n’entrerai pas ici dans l’inutile et fastidieux détail de mes études. Qu’il suffise de dire, que c’est à la langue Latine que j’ai dû le développement et la netteté de mes idées : c’est elle qui m’a donné la propre signification des mots, que je n’entendais auparavant que par routine. Je ne parle pas de la langue Grecque, parce que les termes d’art Latins étant pris dans le langage d’Athènes, on sent la nécessité d’avoir quelque notion du Grec, dès qu’on a commencé d’étudier l’ancienne langue de Rome ;

  1. Venari, asello comite, quum vellet leo,
    Contexit illum frutice, et admonuit simul
    Ut insueta voce terreret feras,
    Fugientes ipse exciperet. Hic auriculas,
    Clamoreque subito, tollit totis viribus… etc.