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à des excès punissables ; ne respectant ni la pudeur, ni la décence ; m’exposant moi-même, exposant des âmes encore pures aux suites affreuses du libertinage, achevant de précipiter, dans ce gouffre immonde, de jeunes filles qui ne s’en étaient encore qu’approchées. Avare quelquefois jusqu’à l’inhumanité, je refusais une bagatelle : prodigue souvent jusqu’à la pusillanimité qui se laisse dépouiller, je soldais lâchement le vice ; honteux par orgueil, avide de louanges, en paraissant les dédaigner ; insouciant et désintéressé par paresse ; cynique par un sentiment superbe de mon mérite ; coquet jusqu’au ridicule ; jaloux, envieux, caustique, grotesque, impudent, quels défauts n’ai-je pas eus !… Et pourtant, je me suis quelquefois privé du nécessaire, pour le pauvre : j’ai souvent été obligeant en secret ; j’ai servi, secouru mes ennemis, sans que jamais ils l’aient su ; j’ai obligé mes amis, sous le nom de personnes qui ne songeaient pas à eux, parce que je préférais le titre d’ami, à celui de bienfaiteur ; j’ai adouci les derniers moments d’un moribond, en feignant d’être chargé d’une réconciliation, que j’ai ensuite effectuée ; j’ai sauvé l’honneur à des filles, à trois femmes ; j’ai vaincu les plus fortes passions ; j’ai, habituellement, rapporté obligeamment les discours désobligeants, pour calmer les inimitiés. Mais on