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siste dans mon projet : ce n’est pas ma vie que je fais ; c’est l’histoire d’un homme.

Il existe deux modèles de mon entreprise ; les Confessions de l’Évêque d’Hippone, et celles du Citoyen de Genève. J’ai beaucoup du caractère d’Augustin ; je ressemble moins à J.-J. Rousseau : je n’imiterai ni l’un, ni l’autre. J’ai des preuves que J.-J. Rousseau a fait un roman ; et pour Augustin, ses Confessions ne sont véritablement qu’un apologue. L’exactitude et la sincérité sont absolument nécessaires, dans mon plan, puisque je dois anatomiser le cœur humain sur mon sens intime, et sonder les profondeurs du moi. Ce ne sont même pas mes Confessions que je fais ; ce sont les Ressorts du Cœur humain que je dévoile. Disparaisse Nicolas-Edme, et que l’homme seul demeure !… Mais il n’en est pas moins vrai que c’est Nicolas-Edme qui s’immole, et qui, au lieu de son corps malade, lègue aux moralistes son âme viciée, pour qu’ils la dissèquent utilement, aux yeux de leur siècle, et des âges futurs. Je serai vrai, lors même que la vérité m’exposera au mépris. C’est ici le cas de tout braver, ou de se cacher ; le parti mitoyen serait une infamie.

Je suis né avec des passions vives : elles m’ont rendu heureux et malheureux. Si l’on me considère sous le premier point de vue, il ne fut