Page:Restif de la Bretonne - Monsieur Nicolas, t. 1, 1883.djvu/241

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

un petit escalier, et arriva, sans être vu, à la porte de la chambre de sa femme, qu’il entendit parler. Il avança la tête, après avoir doucement entr’ouvert un des battants, et il aperçut Raimonde assise sur un lit de repos avec Ebrard, lequel la caressait, et elle lui rendait très bien ses caresses. Raimond, transporté de colère, tira son épée, ouvrit la porte, et entra dans la chambre : mais il ne vit plus personne. Il courut à la chambre d’Ebrard, et il le trouva suspendu au plancher. « Je me suis » trompé ! » pensa Raimond ; « c’est un effet de la jalousie : car qui épouse une fille qui a fait l’amour avec un autre, a empoisonné son mariage… » Il fut ensuite dans la chambre de sa femme, où il la trouva tranquille, assise et brodant avec ses chambrières. — « Je vous cherchais. Madame, » lui dit-il, « ici ne vous ayant vue, quand y suis d’abord entré. — Y étais cependant, » ce lui dit-elle. — « Ne vous y ai pourtant pas vue. — Y étais bien assurément ! Demandez à Bertille. — Vous en croirai mieux que personne, ma femme, » répondit Raimond ; mais il n’aima pas ce Demandez à Bertille, car il sentait la coupable. Et il se promit, à la première fois, d’assurer le repos de sa vie, en découvrant la vérité. »

Courtcou, suivant son usage quand il me faisait des contes, en resta là. Je pourrais finir celui-ci d’imagination ; mais je veux être scrupuleusement vrai. Quoique le berger n’eût pas achevé son conte, pour, en excitant ma curiosité, se faire suivre aux champs un autre jour, par un effet du hasard il ne me le finit jamais.

À la première fois que nous nous trouvâmes libres,