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quel est ce jeune garçon ?… » Ursule me regarda, et dit : « On voit biénn que c’est un Restif, un peuchot écholé par la vézole. » Et elle m’embrassa deux fois. Elle avait les joues douces comme ma cousine Nannon d’Aigremont, et ses roses m’embaumèrent, ou son haleine, je ne sais lequel ; mais femme jamais n’a senti si bon. Cependant elle ne m’inspira qu’une admiration froide ; Edmée Boissard m’occupait plus profondément ; sa taille svelte, son air timide et virginal étaient plus d’accord avec mon goût, que les charmes parfaits d’Ursule… Je présentai l’eau bénite à ma tante et à la Belle ; ensuite mon oncle qui nous suivait, s’empara de moi, et me mena dans le chœur, où était sa stalle : pour lui, il alla chanter au lutrin. Mon père, depuis qu’il avait abandonné la place à l’église de l’honorable Pierre, n’acceptait jamais celle que ses parents ou ses amis lui offraient : « Je ne suis plus rien à Nitry ! » disait-il. Et il allait se mettre en exilé à la porte de l’église, sous les cloches, derrière les plus pauvres : là, il priait sur la tombe de son père, qui reposait en cet endroit. Aussi ne le voyait-on jamais sortir de l’église que les larmes aux yeux.

À l’offerte[1], je m’occupai à vérifier ce que

  1. Les grandes fêtes, toutes les filles au-dessus de quinze ans vont à l’offerte, où elles donnent un liard : c’est une sorte de montre qui retrace en petite et faible image l’ancienne coutume de Sparte, de faire danser nues, dans la place publique, toutes les jeunes filles absolument formées, au milieu d’un cercle composé de tous les garçons à marier.