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bonhomie ! tu n’existes plus nulle part, même à Sacy !) Les branchages en descendaient à deux pieds de terre, de sorte qu’il m’était facile d’y monter. Il était ensuite disposé comme par étages, et l’on allait tant haut que l’on voulait. Un soir, que la journée avait été brûlante, je laissai paître mon troupeau à la fraîcheur. J’étais d’abord monté sur le pommier sauvage ; mais, le jour baissant, j’en descendis et je m’assis au pied de l’arbre. J’étais à peine tranquille, que j’entendis les cris aigus d’un jeune cochon. Effrayé, je remontai sur l’arbre, et, au même instant, j’aperçois au pied un loup qui semblait me menacer ; et, à vingt pas plus loin, un combat qui m’étonna ! La mère-truie était accourue au secours de son marcassin (car il était presque noir comme le sanglier son père) ; elle s’était jetée sur le loup ravisseur, et, d’un coup de groin, elle l’avait lancé en l’air à plus de dix pieds. J’étais ravi ! mais je n’osais descendre, à cause du loup qui gardait le pied de l’arbre, l’œil étincelant. Cependant, je criais : « Au loup ! » de toutes mes forces. On m’entendit de la maison ; les chiens, qui s’y étaient rendus pour boire, arrivèrent les premiers, et Friquette m’eut bientôt délivré de mon assiégeant. L’autre loup, qui avait attaqué le cochon, était au-delà du champ de blé qui bordait la prairie, assis et regardant ce qui se passait. Les deux mâtins le galopèrent, tandis que Friquette, attachée à son camarade, lui faisait sentir sa dent aiguë. Je descendis alors. Mon père arrivait avec son fusil ; les garçons de charrue avec des fourches de fer à