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Noyers, alors en vacances, appelé Barbier. J’avais alors onze ans moins un mois ou six semaines ; je paraissais formé par la taille, et plus encore par mon air sérieux et concentré. J’avais eu fort tard le défaut qui brouilla la Présidente De Mesmes avec son mari ; mais, depuis longtemps, cet accident ne m’arrivait plus à la maison paternelle. Ce fut avec un étonnement douloureux que je m’aperçus d’une rechute à la troisième nuit de mon séjour à Joux ! Quelle honte pour un garçon de mon âge, qui vivait dans une maison où étaient de grandes et jolies filles !… Je fis mon possible pour sécher ma place, mais en vain ; la laine sèche difficilement ! J’avais d’ailleurs un fort bon lit, que je maudis mille fois : j’aurais préféré une paillasse. En me levant, je l’approchai de la fenêtre, que j’ouvris. Mais (et l’on en sera surpris à Paris), je couchais dans la même chambre que deux grandes filles, au premier étage ; ce que, dans les campagnes, on nomme la chambre haute ; le père et la mère étaient au rez-de-chaussée. Lorsque je fus descendu pour aller en classe, je guettais du coin de l’œil si Nannette montait faire les lits ; j’espérais que le mien sécherait, si elle différait jusqu’à midi. Ce fut ce qui arriva. Mais elle s’aperçut de quelque chose. Elle était si éloignée cependant de soupçonner la vérité, qu’elle me dit le soir en se couchant : — « Monsieur Nicolas ! prenez garde, lorsque vous prendrez le pot-de-chambre ! » Ensuite elle rit beaucoup en parlant bas à sa sœur. Je me promis d’être exact ; je ne dormis presque