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une peine cruelle ! La verge de fer est levée sur moi ; et j’ignore si elle frappera…[1]

Les vendanges arrivèrent, et Jacquot ne revenait pas. Blaise le stoïque nous dit froidement qu’il était péri apparemment en s’exposant témérairement à passer au pied du Mont Saint-Michel à la marée montante. Je pleurai mon ancien camarade.

Cependant les occupations à la maison paternelle étaient si multipliées, qu’on fut obligé de me laisser conduire le troupeau, quoique les jours s’accourcissent ; on ne s’informait pas même des pâturages que je fréquentais. On avait soin seulement, à cause du loup, de me faire accompagner par les trois gros chiens, Pinçard, Babillard et Friquette. (Cette dernière était un trésor de fidélité, d’intelligence). Le Grand-Pré, pour lequel j’avais pris goût, fut le pâturage que je préférai : je m’y rendais en droite ligne. Les gens de Nitry, toujours pressés de jouir, vendangent de bonne heure ; de sorte que j’eus la liberté de grappiller dans les vignes, à mon aise, abondamment, en véritable propriétaire ; car les négligents Nitriates avaient laissé de toutes les productions, raisins, pêches, poires, pommes, coings, le tout meilleur que la récolte non mûre des cultiva-

  1. Ceci est relatif à la Paysanne pervertie, dont un misérable voulait empêcher la mise en vente. Il fallut toute la bonne volonté du directeur-général Villedeuil, et les démarches ardentes du citoyen Toustain-Richebourg, pour me tirer de ce mauvais pas. J’étais imprimé, les estampes gravées.