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ET LA JOLIE PAPETIÈRE

M. Assemblage : elle passa ensuite auprès de son amie. — Je ne dois rien te cacher (lui dit-elle) : je n’ai pas tenu ma parole. Et elle lui raconta la scène de la veille avec M. Belleslettres. Rosalie fut si touchée qu’elle parut prête à s’évanouir. Un sourire aimable se traça ensuite sur son visage. — Il ne me verra pas !… du moins en face ! Non ; car tous les soirs, je le vois me regarder, là, aux lumières : cela ne dure qu’un instant… Dis-lui, ma chère Rosette, que je l’estime autant… qu’il le mérite ; dis-lui que je reçois… ses dons volontiers ; ajoute que je le prie… de me parler quelquefois : cela ne sera pas long ! Je sens que je m’affaiblis… tous les jours.

Un mois après cet entretien, et après deux visites de M. Belleslettres, très courtes, la belle Rosalie cessa de vivre… Elle était faible : son cœur, plein de regret et d’amour, ne put supporter l’émotion trop vive de la douleur d’avoir perdu son unique amant, et celle du plaisir d’en être adorée.


On a gravé sur une estampe, qui représente un tombeau, ces vers faits autrefois pour la jeune mademoiselle Duperrier :

Et rose, elle a vécu ce que vivent les roses,
L’espace d’un matin.

Ce qui en a donné l’idée, c’est que depuis sa mort, on voit tous les jours sa tendre et généreuse amie agenouillée sur sa tombe, y prier, les yeux humides, et baiser, en finissant, une miniature, qui est le portrait de Rosalie.

Pour le faible M. Lecture, il a fait, dit-on, l’oraison funèbre de sa fille morte : Il aurait dû la rendre heureuse vivante.