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LA PERFIDE HORLOGÈRE

avertir, par son fidèle laquais, la femme de chambre commune aux deux amies, de venir lui parler : quand il la tint, il lui déclara qu’il était instruit ; qu’il la ferait mettre à l’Hôpital, avec ses maîtresses, si elle ne lui déclarait la vérité ; si, au contraire, elle était sincère, il lui rendrait service ; mais qu’elle songeât bien à ne le pas trahir, en avertissant les deux friponnes. Il lui exposa ensuite ce qu’il savait, et demanda le reste. La fille ne lui cacha rien. Ce fut alors que, bien au fait de tout, M. Santus de Montrouge prit le parti de s’amuser d’une femme de cette espèce, au lieu de se fâcher. Il fit une lettre circulaire pour tous les co-associés, qu’il fit imprimer dans la forme des billets d’invitation des communautés. Elle était conçue en ces termes :

M.

Vous êtes prié de vous trouver demain jeudi 23 du courant, 5 heures de relevée, rue des Deux-Écus, maison de mademoiselle · · · · · · · · appartement de madame Macé et de mademoiselle Brunehaut, pour y délibérer sur une affaire importante, concernant votre communauté.


L’adresse de chacun de ces avis était bien spécifiée, avec tous les noms, toutes les qualités de celui à qui on l’envoyait, le nom de sa rue, et le n° de son hôtel : de manière que lorsque chacun d’eux, après l’avoir reçu, étonné de la formule et de l’avis en lui-même, recourait à la suscription, il ne pouvait douter qu’il ne fût la personne à laquelle ce billet s’adressait : d’ailleurs, tous connaissaient madame Macé et mademoiselle Brunehaut. Le premier qui eut l’avis était un homme en place, amant de Théodosie. Après avoir lu, il se prit à rire : Ma communauté ? ma communauté ? On me prend pour un cordonnier, apparemment ! Puis, réfléchissant sur le lieu indiqué, il ne savait que penser. Il regarda son adresse : — C’est bien à moi !… C’est cette folle de Brunehaut qui veut s’amuser : elle est quelquefois plaisante ! J’irai, cela me vaudra les