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LA PERFIDE HORLOGÈRE

fut extrême ! Il demanda la raison du traitement qu’il éprouvait. — Vous la saurez bientôt, lui répondit-on.

On chercha ; l’on trouva, et Macé confondu, sentit trop tard, qu’un ennemi secret et domestique voulait le perdre. On fit un procès-verbal qui dura vingt-huit heures. Le malheureux Macé emprisonné chez lui, traité comme le plus vil des hommes, voyait ourdir la trame de sa honte et de sa ruine. Les officiers trompés, sans être les comlices d’une abominable trahison, la servaient, en croyant faire leur devoir.

Durant cette scène cruelle, à quoi s’occupait la digne épouse de Macé ? Elle faisait emporter pour plus de vingt mille livres d’effets en bijoux, en linge, en vaisselle d’argent. Elle ne laissa rien à son mari que deux chemises, qui sans doute échappèrent à sa vue. L’infâme nièce de l’infortuné recevait en dépôt les effets, les serrait, tandis que l’épouse, regardant sa propre maison comme une ville prise d’assaut, la pillait elle-même. On transporta ce vol, le plus coupable de tous, dans une chambre louée sous le nom de la détestable Brunehaut, afin que le mari, s’il triomphait un jour, ne pût rien réclamer.

Cependant Macé fut ignominieusement traîné en prison, jeté dans un cachot, et mis au secret le plus rigoureux, pendant plus de cinq mois.

À l’instant où il partit, sa coupable moitié était encore occupée à s’emparer de tout ce qu’elle pouvait prendre, et elle donnait ses larcins par une fenêtre du premier, à Brunehaut, qui était à celle de la maison voisine. Macé les aperçut, et il eut la douleur de voir la joie briller sur le visage de cette épouse et de cette nièce dénaturées. — Adieu ! cria-t-il à la première : mais ne t’enorgueillis pas de ton triomphe ! il sera court ! Il a été plus long qu’il ne le pensait, l’infortuné ! tant il est vrai que la vérité, voilée par le mensonge, se débarrasse difficilement des enveloppes qui la cachent ! Tandis que Macé calomnié était privé de la lumière, son infâme calomniatrice, triomphante et libre, satisfaisait son penchant pour la lubricité : ses