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LA PERFIDE HORLOGÈRE

connue, qu’ils finirent par se la renvoyer l’un à l’autre, et qu’il y en eut deux qui lui firent les propositions les plus avilissantes, seulement pour la mortifier. Mais ils furent trompés dans leur attente ! elle les prit au mot et leur accorda ce qu’ils demandaient, se fiant sur sa beauté, qui n’avait rien à craindre en se montrant sans voile. Les fats en furent éblouis, et le récit qu’ils en firent à leurs camarades donna une nouvelle vogue à Théodosie, qui eut ainsi de quoi assouvir son penchant au libertinage.

Le carnaval passé, elle se trouva incommodée. Elle ignorait la nature de son mal. Heureusement pour elle, que le médecin de son tuteur, était un homme aussi célèbre qu’habile, et plus vertueux encore qu’habile et célèbre, à qui l’on doit le plus sûr des remèdes contre la syphilis ; le docteur Guilbert de Préval vit Théo dosie, et connut aussitôt le genre de son indisposition. Il lui prescrivit des remèdes efficaces, et non seulement il travailla sérieusement à lui rendre la santé du corps, mais, nouvel Astruc, il tâcha de l’effrayer salutairement, en lui faisant envisager les suites affreuses de son inconduite. Théodosie, épouvantée, parut convertie : elle recevait avec des larmes, sans doute sincères, les remontrances de son vertueux médecin ; elle prenait les remèdes avec autant de confiance que d’exactitude ; elle fut beaucoup plus tôt guérie qu’il ne le comptait lui-même. Il s’en aperçut, mais croyant être plus utile à sa malade, en paraissant moins habile, il ne l’en avertit pas : il la laissa dans le doute, et lui fit continuer longtemps des boissons qui ne pouvaient qu’affermir ses mœurs et sa santé. Mais la nature avertit Théodosie de sa guérison complète, et trahit son prudent médecin. Elle reprit les plus belles couleurs ; les désirs revinrent ; l’habitude ne faisait que les rendre plus ardents ; elle ne pouvait plus se contenir. Qui croit-on qu’elle attaqua, dans le doute où elle était encore ? Son médecin. Elle le pria, moitié honteuse, moitié pétillante de luxure, de faire usage de sa science, pour lui procurer ce qu’elle désirait. Ce ne fut