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propriétés d’un sujet donné, en une suite de liaisons toutes nécessaires, comme l’entendait Spinoza. Elle s’évanouit définitivement quand elle porte, non pas sur la totalité du monde, puisque le monde n’a point de totalité dans cette hypothèse, mais sur un infini inaccessible à l’entendement.

Le dilemme, à ce point de vue, prend une physionomie nouvelle : ou le monde, pris en son intégrité, a une cause ; en ce cas, à l’égard de cette cause, il a eu un commencement ; ou le monde est sans cause, parce que, n’ayant pas eu de commencement, toute cause qu’on lui assignerait devrait avoir elle-même une cause, et celle-ci une autre, etc.

Il semble qu’on puisse échapper à ce dilemme en embrassant l’opinion panthéistique de la cause immanente : la cause du monde et le monde seraient coéternels. Il reste à savoir si l’on ne perd pas l’idée de cause, ou ce qu’elle devient, quand on la sépare ainsi de l’idée du commencement de ses effets.

Nous avons à descendre au fond de la pensée déterministe. Les causes sont multiples, s’entremêlent, et leurs effets se combinent. On doit envisager, à chaque moment la cause complexe, au moment suivant, l’effet complexe. Donnons à ces moments, chacun étant pris dans son intégrité, les noms de cause et d’effet. L’effet est, dans toutes ses parties, le seul produit phénoménal qui fût possible, la cause étant donnée. Nul élément d’être n’a pu s’y produire que prédéterminé. Les phénomènes de tous les temps se trouvant, d’après cette loi, éternellement solidaires, le prédéterminisme est la conséquence logique du simple déterminisme (XLII). Il suit de là que la cause de tout ce qui est, est, en un sens profond, unique et toujours présente, par transmission